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HERREWEGHE PHILIPPE (1947- )

Le verbe s'est fait chant

La rencontre de Philippe Herreweghe avec le musicologue français Philippe Beaussant débouche sur la fondation, en 1977, de La Chapelle royale à Paris, ensemble vocal de seize à trente chanteurs qui se double bientôt d'un orchestre jouant sur instruments anciens dont l'effectif peut atteindre une trentaine de musiciens. Le répertoire va de la Renaissance au classicisme. Toujours en 1977, Herreweghe prend en outre la direction du Chœur philharmonique de Liège, avec lequel il va travailler le répertoire romantique et contemporain pendant une dizaine d'années. Nikolaus Harnoncourt et Gustav Leonhardt l'associent à leur enregistrement intégral des cantates de Jean-Sébastien Bach. Puis Herreweghe décide de voler de ses propres ailes et, à partir du début des années 1980, aborde les passions (Passion selon saint Matthieu, 1980) et, surtout, la Messe en si de Bach. Son approche remet en cause toutes les traditions établies et constitue une étape essentielle dans le renouveau de l'interprétation de cette musique en France : le chant choral trouve avec lui une fraîcheur et une spontanéité oubliées. En 1988, il prend la direction de l'Ensemble vocal européen, formation nouvelle dont les membres (une quinzaine de chanteurs) sont issus des douze pays composant alors l'Europe communautaire. À la même période, il commence à élargir son répertoire à la musique du xixe siècle, toujours en cherchant à reconstituer les conditions d'exécution d'époque, style et instruments. Cette nouvelle étape se traduit par la fondation en 1991 de l'Orchestre des Champs-Élysées, dont il est le directeur artistique. Cet ensemble symphonique à géométrie variable se réunit pour cinq ou six sessions annuelles, d'abord à Paris, avant de trouver sa résidence en Poitou-Charentes. À sa tête, Herreweghe est notamment l'un des premiers chefs à enregistrer la version originale du Requiem de Fauré. On le voit aborder Berlioz, Brahms, Bruckner, Franck, Schönberg ou Kurt Weill. Parallèlement, il est invité à diriger des formations symphoniques de tradition dans le monde entier (Orchestre royal du Concertgebouw d'Amsterdam, Orchestre philharmonique de Berlin, Orchestre philharmonique de Vienne...). Son répertoire s'élargit à la musique contemporaine, avec notamment des créations de Sandro Gorli (Requiem, Milan, 1989, à la tête de La Chapelle royale), Jacques Lenot (Le Tombeau de Henri Ledroit, Metz, 1990, à la tête de l’ensemble Musique oblique), Pascal Dusapin (Medeamaterial, Théâtre de la Monnaie, Bruxelles, 13 mars 1992, à la tête du Collegium Vocale de Gand et de La Chapelle royale), Klaus Huber...

De 1982 à 2001, Herreweghe est directeur artistique des Académies musicales de Saintes, où il anime des ateliers d'interprétation de musique ancienne et contribue à passer le flambeau à la nouvelle génération. En 1993, il reçoit le titre d'ambassadeur culturel des Flandres. En 1997, il est nommé docteur honoris causa de l'Université catholique de Louvain. Il devient directeur artistique de l'Orchestre philharmonique royal de Flandre, à Anvers, en 1998, puis chef principal, nominations qui consacrent un rapprochement entre les deux grands courants d'interprétation, traditionnels et « baroqueux », longtemps séparés par un fossé infranchissable. En 2010, il fonde son propre label, Phi, pour explorer le répertoire avec une liberté encore accrue.

Le parcours de Philippe Herreweghe est celui d'un artiste qui cherche : chaque chose vient à son heure et si parfois il ne convainc pas d'emblée, le temps qui passe montre la valeur de sa démarche, marquée par un refus de la routine et une sincérité artistique, qu'il aime à résumer ainsi : « Laisser la musique se défendre par elle-même. »

— Alain PÂRIS

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

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Pour citer cet article

Alain PÂRIS. HERREWEGHE PHILIPPE (1947- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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