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OLYMPIADES POPULAIRES

Le mouvement sportif ne s'est pas structuré en épousant unanimement les idées de Pierre de Coubertin. En effet, durant le premier xxe siècle, les organisations ouvrières internationales refusent l'approche élitiste du baron. Le C.I.O. se voit présenté par celles-ci comme un « ramassis d'aristocrates et de bourgeois » qui, sous couvert d'universalisme, prône le libéralisme et le colonialisme et utilise le sport comme un opium du peuple servant à maintenir la paix sociale. En France, la Fédération sportive athlétique socialiste naît en 1909 sous l'impulsion de la Section française de l'Internationale ouvrière (S.F.I.O.) ; elle devient en 1913 la Fédération socialiste des sports et gymnastique (F.S.S.G.), pour entériner l'absorption de groupements de gymnastes ouvriers. Il s'agit alors de contrecarrer les fédérations sportives officielles, considérées comme « bourgeoises » par la S.F.I.O. : Union des sociétés de gymnastique de France, fondée en 1873 par Eugène Paz, reconnue d'utilité publique en 1903, dont la célèbre devise « patrie, courage, moralité » dit bien l'ambition pour ce qui est de l'éducation du peuple ; Union des sociétés françaises de sports athlétiques, créée en 1887 et fidèle aux idées de Coubertin ; Fédération gymnastique et sportive des patronages de France, d'obédience catholique. En 1920, à l'issue du congrès de Tours qui voit la scission de la S.F.I.O., la F.S.S.G. se divise également : elle laisse la place à la Fédération sportive du travail, proche des communistes, et à l'Union des sociétés gymniques et sportives du travail, proche des socialistes. Plus tard, dans le cadre du Front antifasciste né après les émeutes provoquées par les Ligues le 6 février 1934, ces deux fédérations fusionnent, pour donner naissance à la Fédération sportive et gymnique du travail (F.S.G.T.).

Sur le plan mondial, la Confédération sportive internationale du travail (C.S.I.T.), proche des mouvements socialistes et sociaux-démocrates, voit le jour en 1913 à Gand. En 1925 se déroule à Francfort la première olympiade ouvrière, organisée par la C.S.I.T. : elle réunit un millier de sportifs représentant dix-neuf pays. À la différence des jeux Olympiques, l'esprit de compétition n'est pas encouragé lors de l'olympiade ouvrière : les rivalités nationales doivent être mises en sommeil, l'amitié entre les travailleurs en est le leitmotiv ; les hymnes nationaux n'ont pas droit de cité – ils sont remplacés par L'Internationale –, le drapeau rouge est la seule oriflamme présente sur les stades. De son côté, dès avant sa naissance officielle en 1922, l' U.R.S.S. promeut une autre institution : l'Internationale rouge sportive, liée au Komintern, créée en 1921 à Moscou. En juillet 1928, l'Internationale rouge sportive organise à Moscou les premières Spartakiades internationales, joutes athlétiques dédiées à la promotion de la lutte des classes : quelque quatre mille cinq cents « sportifs prolétaires », représentant seize pays, participent à cette première édition des Spartakiades internationales.

Contrairement aux pontes du C.I.O. et à tous les gouvernements, le mouvement ouvrier ne se satisfait pas de voir les Jeux de 1936 annexés par les nazis. En France, la F.S.G.T. se mobilise derrière le slogan « Pas un sou, pas un homme pour les jeux Olympiques de Berlin ». En Suisse – pays du siège le C.I.O. –, de vifs débats se déroulent au Parlement au sujet de la subvention octroyée à la délégation nationale pour les Jeux de Berlin : dans un premier temps, sous la pression des socialistes, celle-ci est refusée ; le Parlement se ravisera. On se mobilise en Belgique, au Danemark... L'idée de Jeux alternatifs prend forme. Anvers et Prague sont candidates à l'organisation de contre-jeux[...]

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Écrit par

  • : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs

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Pour citer cet article

Pierre LAGRUE. OLYMPIADES POPULAIRES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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