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NIOBIDES PEINTRE DES (2e quart Ve s. av. J.-C.)

Une fois que les grands artistes de la deuxième génération des peintres de vases attiques utilisant comme moyen d'expression la technique des figures rouges eurent porté à leur point de perfection la qualité technique du dessin (ainsi le Peintre de Berlin, le Peintre de Cléophradès, Douris, Macron et le Peintre de Brygos), les décorateurs de vases qui commençaient leur carrière après les guerres médiques furent obligés soit de répéter, en une plate imitation, le style « sévère » de leurs aînés, soit d'apporter à tout prix des éléments de nouveauté. Quelques peintres majeurs s'orientent alors vers une adaptation à la céramique de quelques-unes des trouvailles faites par la grande peinture contemporaine, en particulier par Polygnote de Thasos et par Mikon d'Athènes, pour autant qu'on puisse se faire une idée précise des tableaux de ceux-ci d'après les descriptions de textes antiques. Ainsi naît, vers ~ 470, le style « libre », qui exprime le passage définitif de l'archaïsme au classicisme ; le Peintre des Niobides — artiste anonyme qui doit ce nom conventionnel au cratère du Louvre, G 341, dont l'une des faces montre le massacre des enfants de Niobé par les jumeaux divins Apollon et Artémis — est un des premiers représentants de ces tendances nouvelles, bien que cet esprit nouveau n'anime pas toutes ses œuvres.

Comme son « frère aîné » — selon l'expression de J. D. Beazley —, le Peintre d'Altamura (ainsi nommé d'après le lieu de trouvaille, en Italie, du cratère du British Museum, E 469), le Peintre des Niobides a décoré uniquement des vases de grande taille : cratères de diverses formes (à volutes, en calice, en cloche), amphores, amphores à panse ventrue vers le bas (pélikè), hydries ou encore des cruches pour le vin (œnochoé). On lui attribue à ce jour un peu plus d'une centaine d'œuvres, volontiers décorées de sujets empruntés à la tradition héroïque ou mythologique : Ilioupersis (mise à sac de Troie), gigantomachie, amazonomachie, centauromachie, réunions de dieux ou poursuites liées aux amours divines (Borée et Orithye, Éos et Képhalos). Certaines scènes sont grandioses, en particulier sur les cratères à volutes, où le décor fait librement tout le tour de la panse et du col, sans être interrompu par les anses, par exemple sur le cratère d'Agrigente où l'on voit une centauromachie sur le col et une amazonomachie sur la panse : les attitudes variées des personnages, les positions très étudiées de certains d'entre eux (ainsi celle de ce Grec qui pose le pied sur un rocher tout en se concentrant pour viser une Amazone de sa lance), la présentation de trois quarts ou de face de certains corps et de certains visages, l'expression du regard traduite par des yeux enfin dessinés d'une façon conforme à la réalité quand la tête est vue de profil, tout cela trahit manifestement une esthétique nouvelle. Aucune œuvre du Peintre des Niobides ne le montre comme celle qui est à l'origine de son nom. Ici, l'influence d'une grande composition picturale est évidente : sur les deux faces du cratère, de nombreux personnages se répartissent sur plusieurs plans, à des étages différents, le sol étant matérialisé par les lignes ondulées des rochers, qui dissimulent partiellement le corps de certains personnages, d'où l'illusion d'une profondeur de champ variable ; certains visages sont des plus expressifs, grâce aux bouches entrouvertes et à l'intensité des regards ; quelques éléments, les boucliers par exemple, sont représentés en raccourci ; les corps nus de plusieurs des personnages masculins prennent, grâce au dessin précis des détails anatomiques, aux poses parfaitement équilibrées et à la vie intense des visages, une grande valeur plastique, le Peintre des Niobides allant nettement plus loin, sur ce point, que les Peintres de Berlin, de Brygos ou de Cléophradès.[...]

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Écrit par

  • : ancien membre de l'École française d'archéologie d'Athènes, docteur ès lettres, professeur de civilisation grecque à la Sorbonne (Paris IV)

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Pour citer cet article

Jean-Jacques MAFFRE. NIOBIDES PEINTRE DES (2e quart Ve s. av. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009