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NAVIRES Vue d'ensemble

Est-il un objet sorti de la main de l'homme qui, plus que le navire, ait fait progresser la connaissance du monde où nous vivons, et le développement de son économie ? Sans remonter jusqu'à l'Arche de Noé qui aurait sauvé l'humanité du Déluge, Christophe Colomb aurait-il découvert l'Amérique s'il n'avait disposé de caravelles pouvant affronter les océans ? Et les navires d'aujourd'hui ne transportent-ils pas 90 p. 100 des marchandises échangées dans le monde ?

Une constatation s'impose : sans que l'on puisse dire à quelle époque est apparu le premier navire, son invention a été de toute façon nécessaire à partir du moment où l'homme s'est donné pour but de franchir le bras de mer qui le séparait d'une île, fût-elle proche du continent, et, naturellement, le perfectionnement d'un outil aussi utile sera par la suite constamment recherché. Cette marche en avant reposera pendant de longs siècles sur la seule expérience des charpentiers constructeurs et des marins navigateurs. Ce n'est guère qu'au xviiie siècle, avec la naissance de la science moderne, que le vaisseau deviendra un objet d'études scientifiques : Newton et Euler s'y intéresseront, et Bouguer pourra être reconnu par ses lointains successeurs comme le père de l'architecture navale.

Le milieu du xixe siècle marque un tournant important dans l'histoire du navire, avec le remplacement du bois par l'acier pour la réalisation de sa charpente, et celui de la voile par la vapeur et l'hélice pour sa propulsion. C'est de ce navire moderne dont il est question ici.

Les évolutions les plus importantes que le navire moderne a connues depuis lors peuvent se résumer en quelques mots : spécialisation, capacité, performances, qui prennent plus ou moins d'importance selon le service que l'on attend du bâtiment.

La spécialisation progressive des navires est un des traits les plus marquants de ce mouvement. Si, au début du xxe siècle, on ne parlait guère encore pour les navires de transport que de paquebots et de cargos, la liste des différents types de navires est aujourd'hui impressionnante : les paquebots de croisière, les transbordeurs rapides, les rouliers, et même les navires à effet de surface, ont pratiquement supplanté les paquebots de lignes régulières. Quant aux cargos, ils n'ont pas disparu, mais ils ont très largement cédé la place aux vraquiers, porte-conteneurs, pétroliers, méthaniers, etc., auxquels viennent s'ajouter des câbliers, brise-glace et autres navires conçus pour accomplir un service particulier.

La tendance à la spécialisation s'est manifestée pareillement pour les navires de guerre avec l'apparition du sous-marin dans les dernières années du xixe siècle, puis celle du porte-avions avant la Seconde Guerre mondiale, sans compter par exemple celle des bâtiments de projection qui permettent d'amener à pied d'œuvre les chalands de débarquement et les matériels nécessaires pour mener à bien des opérations outre-mer.

L'augmentation des capacités, donc du déplacement, a surtout marqué les navires de commerce, car elle correspond à une nécessité économique, mais il ne s'agit pas là d'un phénomène irréversible comme le montre l'exemple des pétroliers géants construits dans les années 1970. Le même mouvement ne s'est pas produit aussi nettement pour les navires de guerre car leur programme militaire, qui conditionne leur déplacement, peut souvent être réalisé avec des systèmes d'armes plus puissants sans être nécessairement plus gros ; c'est ainsi que l'artillerie lourde des cuirassés a pu être avantageusement remplacée par des systèmes d'armes plus légers à base de missiles. Et si les sous-marins nucléaires lanceurs de missiles balistiques sont évidemment beaucoup plus lourds que les sous-marins classiques, c'est essentiellement[...]

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Écrit par

  • : ingénieur général de l'armement (génie maritime), expert agréé par la Cour de cassation, membre de l'Académie de marine

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