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FELDMAN MORTON (1926-1987)

Le compositeur américain Morton Feldman est l'un des représentants du graphisme musical qui a tenté de libérer la musique de la rigueur de la notation traditionnelle.

Né à New York, il travaille le piano avec Vera Maurina-Press, une amie de Scriabine et disciple de Ferrucio Busoni. Puis il se tourne vers la composition, qu'il étudie avec Wallingford Riegger, l'un des premiers défenseurs du dodécaphonisme aux États-Unis, et Stefan Wolpe. Il fréquente les galeries de peinture new-yorkaises et subit profondément la marque de la peinture expressionniste abstraite. Sa rencontre avec John Cage, au début des années 1950, va jouer un rôle déterminant dans la suite de sa carrière. Il travaille en étroite liaison avec lui et forme, en compagnie du compositeur Earle Brown et du pianiste David Tudor, un groupe qui occupe une place essentielle dans la vie musicale américaine. Il élabore un système de composition qui permet d'intégrer des éléments indéterminés dans l'interprétation de sa musique. Ses premières partitions (Projections, pour violoncelle, 1950-1951 ; Marginal Intersection, pour orchestre et bande magnétique, 1951) sont notées sur papier quadrillé ; seul le temps est fixé de façon précise (la durée étant fonction de la longueur des rectangles), les hauteurs, les dynamiques et l'expression restant, dans une très large mesure, à l'appréciation de l'interprète. Cette notation approximative débouche sur un véritable graphisme musical qui génère de réelles œuvres d'art et qui permet de donner aux éléments indéterminés toute leur importance. Elle se concrétise dans des séries de partitions instrumentales dont les titres évoquent les préoccupations multidimensionnelles du musicien : Durations I-V, Extensions I-V, Projections I-V, Vertical Thoughts I-V, Intermissions I-VI, Structures I-II, etc. À la fin des années 1950, Feldman abandonne progressivement le graphisme musical (sa dernière œuvre en la matière est In Search of an Orchestration) et élabore un système plus précis où la notion de temps reste néanmoins déterminée : tous les exécutants se voient confier la même partie, mais ils doivent la jouer à des vitesses différentes, ce qui produit une réverbération multiple de la même source sonore (Piece for 4 Pianos, 1958). Il s'oriente vers des expériences de type unidimensionnel et revient progressivement à une notation rigoureuse (Madame Press Died Last Week at the Age of Ninety, pour ensemble instrumental ; The Viola in my Life, pour alto et six instrumentistes, 1970). Au-delà des différents moyens d'expression, Feldman s'impose comme un explorateur de l'univers sonore et du silence. Sa musique reste toujours abstraite, même s'il cède parfois à la tentation de l'écriture répétitive.

À la fin de sa vie, Feldman sera nommé professeur Edgar Varèse à l'université de l'État de New York (Buffalo) et directeur du Center for Creative and Performing Arts. Sa dernière œuvre, Piano, Violin, Viola, Cello, est une commande du Middleburg Festival.

— Alain PÂRIS

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

Classification

Pour citer cet article

Alain PÂRIS. FELDMAN MORTON (1926-1987) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • IMPROVISATION MUSICALE

    • Écrit par André-Pierre BOESWILLWALD, Alain FÉRON, Pierre-Paul LACAS
    • 5 113 mots
    • 3 médias
    ...leurs pouvoirs, les créateurs pensent avoir conquis la mobilité, l'ouverture de l'œuvre sur un avenir toujours renouvelé car partiellement indéterminé. Feldman, lui, invente un langage graphique permettant de s'échapper des contraintes « directionnelles » d'une notation devenue désormais trop « autoritaire...

Voir aussi