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LA GRANDE PARADE DE PY (O. Py)

Auteur, acteur, metteur en scène et chef de troupe, scénographe, directeur du Centre dramatique national (Orléans), Olivier Py poursuit depuis les années 1980 un parcours qui embrasse tous les genres et tous les styles, du cabaret à l'opéra, des formes brèves au poème dramatique, des contes pour enfants aux sagas épiques. Il n'hésite pas à signer des œuvres fleuves qui tiennent le spectateur en haleine pendant cinq heures (Le Visage d'Orphée, 1997), onze heures (L'Apocalypse joyeuse, 2000), voire vingt-quatre heures d'affilée (La Servante, 1995). Il prend le risque d'inscrire ses spectacles dans l'actualité pour en dénoncer l'horreur et les lâchetés, comme il l'a fait avec Requiem pour Srebrenica en 1999. Affirmant ouvertement son catholicisme et son homosexualité, il joue des paradoxes, traitant du sexe et de la foi, de la douleur et de la Joie. Parce qu'il est à la fois celui du corps et celui de l'âme, son théâtre se veut à l'échelle du monde. Au printemps de 2006, répondant à l'invitation du théâtre du Rond-Point à Paris, il est venu présenter un cycle reprenant sous le titre générique de La Grande Parade de Py, deux grandes pièces, deux contes pour enfants, une Épître aux acteurs ainsi que plusieurs chansons pour cabaret.

Les grandes pièces, ce sont Les Vainqueurs et Illusions comiques. La première entraîne le spectateur sur les traces d'un aventurier au mystérieux sourire, faux fils de roi, mais vrai travesti, assassin et escroc, captateur de fortune. Construit en un prologue et trois actes, ce voyage de dix heures s'achève avec la mort du héros, réduit à l'état de fossoyeur. La scène en est l'univers, ou plutôt la Méditerranée, des Balkans aux hauteurs de Carthage, puis de Grasse. Les mots sont crus, certaines scènes violentes. Le sado-masochisme voisine avec les préoccupations métaphysiques, la fête païenne avec le dialogue philosophique, tandis que s'élèvent les disputes sur l'homme face à Dieu, ou sur ce qu'être chrétien veut dire. L'écriture, tout en ruptures, fait la part belle aux envolées lyriques autant qu'à la farce joyeuse. Par son souffle, elle rappelle le Claudel du Soulier de satin, dont Olivier Py a signé une mise en scène mémorable en 2003.

Avec Illusions comiques, les références sont autres : le Corneille des comédies baroques mais aussi le Molière de L'Impromptu de Versailles, dont s'inspire la trame : la première scène réunit un auteur et ses acteurs en vue de la création d'un spectacle. Très vite, le propos s'emballe : le « monde » en crise se révèle soudainement avide de sa parole. Journalistes, politiques, hommes d'Église pressent l'auteur de répondre aux désordres du temps. Grisé et poussé par sa mère, il accepte de jouer les guides, jusqu'au moment fatal où il est renvoyé aux oubliettes. Dédiant Illusions comiques à Jean-Luc Lagarce, Olivier Py annonce d'entrée, dans la Préface, une « prétention ridicule de tout dire sur l'art dramatique et le mystère théâtral ».

À quoi sert le théâtre ? Et quelle est sa place ? Quel est son sens ? Les questions se bousculent, dans la confusion du réel et de l'illusion. Face aux personnages de la Mort, de Dieu, du Pape, du ministre de la Culture, du président de la République, des marchands du temple et de la mode, les comédiens jouent leur propre rôle, tout comme Olivier Py, auteur et metteur en scène de cette folle course satirico-philosophique, entre rêve et cauchemar. Foisonnante, proche parfois de la logorrhée, la pièce fait la part belle aux acteurs comme Elisabeth Mazev (la « mère ») ou Michel Fau, sidérant dans la scène de « la leçon de théâtre » : travesti, il y interprète simultanément le rôle du professeur qui donne la leçon et celui de la vieille tante qui la reçoit, moitié Sophie Desmarets, moitié Jacqueline[...]

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Écrit par

  • : journaliste, responsable de la rubrique théâtrale à La Croix

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Pour citer cet article

Didier MÉREUZE. LA GRANDE PARADE DE PY (O. Py) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 12/11/2009