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POBEDONOSTSEV KONSTANTIN PETROVITCH (1827-1907)

Homme d'État russe, né à Moscou d'un père pope et juriste de formation, Pobedonostsev commence par enseigner le droit civil russe à l'université de Moscou (1860-1865) et, en qualité de précepteur, au futur tsar Alexandre III. Sénateur de Saint-Pétersbourg en 1868, il entre au Conseil impérial en 1872 et succède à Dimitri Tolstoï comme procureur général du Saint-Synode en 1880. À ce poste comme tout au long de sa carrière politique, il sera, dans les domaines civil et religieux, l'homme de la russification intransigeante. Il récuse les inventions pernicieuses de l'Europe de son temps : le parlementarisme, la justice de jury, la liberté de conscience. L'orthodoxie se résume pour lui dans l'exaltation des observances liturgiques anciennes et notamment dans le culte des icônes. La structure de l'Église, l'institution cléricale comme telle l'intéressent peu ; la fameuse idée de sobornost, chère aux slavophiles, avec lesquels il a pourtant des points communs, lui est étrangère.

Conséquent avec sa doctrine, il fera méthodiquement obstruction aux mesures de libéralisation dictées par la crise intérieure de l'État. Un oukaze d'Alexandre III (3 mai 1883) restitue quelques droits civils aux vieux-croyants ; le procureur, de connivence avec le ministre de l'Intérieur Dimitri Tolstoï, en paralyse l'application. Les réformés baltes passés à l'orthodoxie dans les années 1840 voudraient réintégrer leur confession première ; le procureur, malgré l'intervention de leurs coreligionnaires allemands, s'oppose à cette « apostasie ». Nicolas II promulgue son édit de tolérance en faveur des minorités religieuses (17 avr. 1905) ; le procureur s'ingénie à en entraver la mise en œuvre. Dans le même temps, le président du Comité des ministres, le comte Witte, sollicite du métropolite de Saint-Pétersbourg, Antoine, un avant-projet de réforme de l'administration ecclésiastique ; le procureur, inquiet, imagine de confier l'élaboration de la réforme au Saint-Synode, mais celui-ci, contre son attente, s'en décharge sur un futur concile de l'Église russe. Le décret impérial du 17 octobre 1905, en proclamant l'inviolabilité de la personne humaine et la liberté d'expression, porte le coup fatal au procureur qui se retire et meurt à Saint-Pétersbourg. Il reste pour l'histoire la dernière grande figure dans la lignée des procureurs du Saint-Synode.

Pobedonostsev a laissé une sorte de testament politique dans son Moskovskij Sbornik (« Recueil de Moscou »), paru en 1896 et traduit en français sous le titre Questions religieuses, sociales et politiques (1897). On lui doit également une traduction en russe de l'Imitation de Jésus-Christ.

— Jean GOUILLARD

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)

Classification

Pour citer cet article

Jean GOUILLARD. POBEDONOSTSEV KONSTANTIN PETROVITCH (1827-1907) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ALEXANDRE III ALEXANDROVITCH (1845-1894) empereur de Russie (1881-1894)

    • Écrit par Pierre KOVALEWSKY
    • 433 mots

    Second fils d'Alexandre II, il ne devint héritier présomptif qu'à la mort de son frère, le grand-duc Nicolas, mort en 1865. Un an après, Alexandre épouse la princesse Dagmar de Danemark et prend part aux travaux du gouvernement de son père, dont il adopte alors les idées réformatrices. Au lendemain...

Voir aussi