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ICAZA JORGE (1906-1978)

Romancier équatorien, Jorge Icaza fut, avec Alcides Argüedas, Ciro Alegría et Miguel Ángel Asturias, l'une des plus illustres figures de l'indigénisme littéraire en Amérique du Sud. Né à Quito, Jorge Icaza, après des études secondaires, veut devenir médecin. La mort de ses parents, deux ans plus tard, lui interdit de réaliser ce projet. Il entre au cours de déclamation du Conservatoire de musique, puis il est engagé par la Compagnie dramatique nationale. C'est alors qu'il connaît sa future épouse, Marina Moncayo, vedette de la troupe. Il se met à écrire des pièces de théâtre qui obtiennent un certain succès (El Intruso, 1928 ; La Comedia sin nombre, 1929 ; Por el viejo, 1929). L'exploitation des misérables, les conflits raciaux, la dureté impitoyable de la lutte pour la vie des classes opprimées, tels sont ses premiers thèmes ; on les retrouve encore dans les quatre autres pièces qui complètent son répertoire (Cuàl es ?, 1931 ; Como ellos quieren, 1931 ; Sin sentido, 1932 ; El Flagelo, 1940).

Un recueil de nouvelles, Barro de la Sierra (1933) inaugure une vaste fresque de la vie des Indiens. Le paysage est stylisé en quelques touches brutales, les personnages déformés comme d'âpres caricatures. La soif, l'exode, la prison, l'enfer de la maladie et de la pauvreté, l'épuisement et la mort, voilà quelques motifs de ces scènes atroces, où la civilisation de l'homme blanc fait concurrence à la nature hostile pour détruire les faibles. Obscurément se fait jour pourtant le pressentiment d'une union possible des travailleurs venant au secours d'une race à l'agonie qui, selon l'expression de l'auteur, « s'est diluée » dans les classes sociales. Publié en 1934, Huasipungo est le chef-d'œuvre de Jorge Icaza. Traduit en plus de quatorze langues, ce roman connaît un succès retentissant et consacre la renommée de l'écrivain. Le récit met en scène un groupe d'Indiens obligés de construire, à travers la forêt, une route au profit d'une société nord-américaine. Le patron de l'entreprise n'a pas le moindre égard pour ce bétail humain. La révolte éclate quand on veut arracher aux Indiens leurs misérables lopins de terre avec leurs cases, leurs huasipungos, afin d'y construire des maisons pour les ingénieurs blancs. La troupe intervient ; un massacre extermine les Indiens clamant leur dernier cri : Ñucanchic huasipungo (« Le huasipungo est à nous »). L'impassibilité de la narration, les dialogues laconiques et cinglants, l'érotisme mêlé à l'extrême violence, le rythme rapide et dépouillé, tout contribue à donner à ce livre une tension dramatique qui va en s'accentuant jusqu'à l'hécatombe finale. Icaza attendait beaucoup de la force persuasive de son roman pour rétablir plus de justice en son propre pays ; à cet égard il s'avouait déçu ; mais il se déclarait heureux de l'écho qu'il avait trouvé sous d'autres latitudes et de l'éveil des consciences qu'il avait provoqué partout en Amérique.

En las calles (1935) et Cholos (1937) illustrent le même combat révolutionnaire, dans la ligne des Siete Ensayos de interpretación de la realidad peruana (1928) de José Carlos Mariátegui, dont Icaza reprend les thèses socialistes. Des masses paysannes l'évocation s'étend désormais jusqu'à la ville. Le romancier montre aussi des métis qui se vouent à la libération des Indiens. Icaza manifeste une connaissance admirable du langage parlé, qu'il transcrit avec une fidélité scrupuleuse.

Icaza dorénavant affirme sa vocation. Le cadre de ses romans s'élargit. Les personnages se multiplient en un vaste tableau où toute la société équatorienne est reflétée, du montuvio (habitant de la côte) jusqu'aux gringos (étrangers, yankees), en passant[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

Classification

Autres références

  • AMÉRIQUE LATINE - Littérature hispano-américaine

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    • 16 963 mots
    • 7 médias
    ...sur l'exploitation des Indiens dans les mines, et certains romans équatoriens produits par le « groupe de Guayaquil », dont le membre le plus fameux fut Jorge Icaza (1906-1978) ; son Huasipungo (1934, La Fosse aux Indiens), notamment, accumule des épisodes d'une horreur presque insoutenable. Non moins...