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ARDEN JOHN (1930-2012)

John Arden est né en 1930 à Barnsley, dans le Yorkshire. Des auteurs dramatiques du « nouveau théâtre anglais » des années 1950 et 1960, il est sans doute le plus brechtien. Comme Brecht, il croit nécessaire un détour par la fable, ou par l'histoire, pour rendre compte du monde contemporain. Pour lui, comme pour Brecht, le théâtre est une activité collective à laquelle doivent participer créateurs et techniciens et qui s'adresse à un public spécifique dont il doit refléter, directement ou indirectement, les préoccupations.

Sa formation d'architecte le pousse à s'intéresser aux aspects techniques du théâtre, d'où la complexité de ses dispositifs scéniques. Ses convictions politiques le conduisent à poser en termes théâtraux des conflits de groupes plutôt que des conflits individuels, des problèmes qui touchent à la vie des citoyens dans la cité. Comme Wesker et comme Bond, c'est un poulain du Royal Court où est montée, dès 1957, Les Eaux de Babylone (The Waters of Babylon). Cette comédie aux multiples rebondissements montrait dans le Londres de 1956 une nouvelle Babylone de la corruption et de l'exil où se côtoyaient prostituées, politiciens, exploitants immobiliers, immigrés exploités et souteneurs. Il n'était pas facile d'y trouver un message clair ni de savoir qui le public devait juger et condamner. La pièce suivante fut, en 1958, Vous vivrez comme des porcs (Live Like Pigs) : quelle solution trouver au problème des marginaux qui n'arrivent pas à s'intégrer dans la forme aseptisée de société que leur propose, ou voudrait leur imposer, le Welfare State ? La pièce posait la question sans donner de réponse. Ni réquisitoires ni plaidoyers, toutes les premières pièces d'Arden refusent de diviser le monde entre bons et méchants, de juger de haut les conduites humaines. Et, de même qu'il refuse tout dogmatisme et manichéisme, Arden se montre éclectique dans le choix de ses moyens. Il emprunte à toutes les traditions : la moralité médiévale, le drame élisabéthain, le music-hall moderne, les ballades populaires, voire les masques dans L'Asile du bonheur (The Happy Haven).

La Danse du sergent Musgrave (Serjeant Musgrave's Dance), écrite en 1959 et mise en scène au Royal Court par Lindsay Anderson, est sans doute la pièce la plus connue d'Arden. Par le biais d'une « parabole non historique » montrant le retour au pays de quatre soldats ayant déserté une guerre coloniale, elle met en évidence les paradoxes et les contradictions de qui veut lutter (par quelles armes le faire ?) contre l'engrenage de la violence. Selon les termes de Peter Brook, qui en fit à Paris, en 1963, une mise en scène éclatante, la danse finale, sur la place publique, en présence du squelette en uniforme macabrement brandi, montrait comment « le besoin violent d'imposer une signification peut soudain faire surgir une forme incontrôlable, imprévisible ».

Assez vite Arden se retire à la campagne et, en alternance avec des pièces « professionnelles », choisit de monter, avec sa femme, l'actrice irlandaise Margaretta d'Arcy, des pièces « de circonstance », produites et jouées dans une communauté donnée : ainsi, une nativité dans une église du Somerset, The Business of Good Government.

Dans les années 1970, après un voyage en Inde, où il se retrouve brièvement en prison, et par une sensibilisation de plus en plus grande aux problèmes de l'Irlande, où il va vivre avec sa femme, l'engagement politique d'Arden se radicalise. Contrairement à toute sa pratique précédente, The Ballygombeen Bequest, qu'il présente au festival d'Édimbourg en 1972, est une pièce qui, renouant avec la tradition de l'agit-prop, ne fait pas de quartiers et présente les grands propriétaires terriens en Irlande comme des marionnettes grotesques. Un peu plus tard, des incidents[...]

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Pour citer cet article

Marie-Claire PASQUIER. ARDEN JOHN (1930-2012) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Littérature

    • Écrit par Elisabeth ANGEL-PEREZ, Jacques DARRAS, Jean GATTÉGNO, Vanessa GUIGNERY, Christine JORDIS, Ann LECERCLE, Mario PRAZ
    • 28 170 mots
    • 30 médias
    ...pratiquement le seul en Angleterre à se réclamer d'Artaud, part pour Paris en 1968 pour fonder le Centre international de recherches théâtrales, tandis que John Arden, principal représentant du courant brechtien, désespéré par le public bourgeois de la capitale, part d'abord dans le Nord industriel, puis en...

Voir aussi