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MURAT JEAN-LOUIS (1952-2023)

Dans les décennies 1990 et 2000, le chanteur et compositeur auvergnat Jean-Louis Murat fut l’un des créateurs, avec Dominique A et Alain Bashung, d’une scène française intellectuelle, sophistiquée et d’une sensibilité à fleur de peau. Avec ses chansons qu’il poussait dans l’épaisseur du rock lorsqu’il les déconstruisait sur scène, cet admirateur de Neil Young et collectionneur de guitares était un artiste à part, qui critiquait avec virulence le paysage de l’industrie de la musique.

Un artiste auvergnat

Né le 28 janvier 1952 à Chamalières (Puy-de-Dôme), Jean-Louis Bergheaud grandit à Murat-le-Quaire, dont il tire son nom d’artiste, et élit par la suite domicile à quelques kilomètres de là, près d’Orcival, trois communes du Parc naturel régional des Volcans d’Auvergne qu’il ne quittera jamais. De cet indéfectible ancrage, l’artiste gardera un fort accent auvergnat, un peu traînant avec des « o » ouverts, ce qui fut souvent pris pour du maniérisme, qualité dont le dandy bougon et provocateur n’était pas exempt.

D’un père menuisier et d’une mère couturière, Murat joue du tambour puis du cornet à pistons dans l’harmonie municipale près de chez lui avant d’étudier le saxophone au conservatoire. Saisi par l’envie d’un nomadisme à la Jack Kerouac, il se donne le temps de la poésie itinérante pendant quelques années, avant de retourner en Auvergne en 1977 pour y monter Clara, un groupe de rock repéré, puis aidé un temps par le chanteur William Sheller. En 1981, cet urbain campagnard tourmenté devient culte auprès de quelques jeunes passionnés, avec la parution de « Suicidez-vous le peuple est mort », un 45-tours enregistré en solo dont la pochette est signée Jean-Baptiste Mondino. Toutefois, le titre est écarté des diffusions radiophoniques, et le succès commercial n’est pas au rendez-vous. L’année suivante, l’album Murat, marqué par la new wave synthétique de l’époque, passe inaperçu.

En 1987, nouvellement signé chez Virgin, Murat fait paraître le 45-tours « Si je devais manquer de toi ». Reconnu du public, ce morceau ouvre le chemin à l’album Cheyenne Autumn (1989), et marque le début d’une complicité jamais démentie avec le multi-instrumentiste et producteur Denis Clavaizolle. Suivent Le Manteau de pluie (1991) et Vénus (1993). L’artiste, désiré mais toujours sur la réserve, entame enfin une tournée.

Chanteur séduisant, aux yeux bleus perçants, Murat ancre sa musique et sa poésie dans son territoire parce que, disait-il, « les animaux, les fleurs, les arbres, les nuages, l’eau, la neige, c’est mon quotidien. Et mes voisins sont des paysans, avec qui on ne parle que de ça : si l’orage est passé, s’il a neigé, si les frênes poussent, s’il y a des perce-neige cette année. »Il vit et travaille dans une ancienne ferme près d’Orcival, lieu de pèlerinage avec sa basilique romane et sa vierge thaumaturge. Parmi les autres sites qui nourrissent son univers et ses chansons, le village de Pessade, où il crée LeManteau de pluie, quand, pionnier là aussi, il capture, à l’échantillonneur, le vent, le silence, le son des étables, mêlant grillons et ruisseaux à une musique pop évanescente, les pâturages du massif du Cézallier et le Mont Sans-Souci – centre de vacances de La Bourboule, station thermale et familiale – dont il fait une chanson, tout comme le col de la Croix-Morand, au pied du puy de la Tâche, chanté en 1991, juste avant que « Regrets », un duo avec Mylène Farmer, ne l’entraîne vers le succès.

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Pour citer cet article

Véronique MORTAIGNE. MURAT JEAN-LOUIS (1952-2023) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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