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CARLU JEAN (1900-1997)

Né le 30 mai 1900 à Bonnières-sur-Seine dans une famille passionnée d'architecture (il est le frère cadet de Jacques Carlu), Jean Carlu s'engage dans cette voie à l'École des beaux-arts de Paris. Alors qu'il vient d'être primé au concours d'affiches du dentifrice Glycodont, le 28 octobre 1918, le jeune homme a le bras droit sectionné par un tramway. À dater de ce jour, sa carrière prend un tout autre tour. Abandonnant le té et l'équerre de l'architecte, Carlu se tourne vers l'affiche et apprend à dessiner de la main gauche. Engagé chez Sirven, l'imprimeur d'affiches (1919-1921), il réalise ses premiers travaux dans le style de Capiello, dont les principes esthétiques reposent sur une organisation rigoureuse des masses lumineuses de l'image : une tache claire sur un fond sombre et inversement. Très rapidement, Carlu tente de mettre en œuvre les recherches de l'art d'avant-garde. Le cubisme le passionne, en particulier les conceptions d'Albert Gleizes. Son affiche pour les phares Marchal (1924) obéit aux lois de la section d'or. Dès 1923, une conférence de Juan Gris à la Sorbonne avait apporté des éléments de réponse aux questions que se posait Carlu sur l'expression graphique de l'idée. Si les formes, les couleurs, les lignes induisent des significations et des émotions, pour s'exprimer avec efficacité le motif doit s'approprier ce langage plastique. En 1925, sa création Monsavon l'impose parmi les grands noms de l'art publicitaire d'avant-garde ; avec une technique dérivée du cubisme, cette affiche – véritable coup de poing pour le spectateur – représente au premier plan un bras tendant une savonnette. Une affiche pour le dentifrice Gellé (1928) repose sur « un triangle blanc éclatant au milieu d'un profil rouge très vif... » ; celle de Paris-Soir, qui lui est contemporaine, met en scène l'avancée progressive du cri qui annonce le vendeur de journaux. En 1929, devenu un maître reconnu, il rejoint, avec Cassandre, Loupot, Francis Bernard et Colin, l'Union des artistes modernes, dont il devient le porte-parole. En 1932, Carlu fonde l'Office de propagande graphique pour la paix et apporte son soutien au Front populaire, dont il devient un des dessinateurs. De cette même année date son affiche en faveur du Désarmement, où, pionnier en France de cette technique, il utilise le photomontage. Dans cette affiche, il dramatise des éléments strictement graphiques – triangles, cercle, sphère – en leur associant l'image d'une femme terrorisée portant son enfant dans les bras. À l'heure où le nazisme installe sa menace sur l'Europe, il dénonce la course aux armements et les marchands de canons. Curieux de techniques nouvelles, il réalise des affiches en relief, véritables sculptures (Triomphe du blanc, 1932), des affiches lumineuses (Cuisine électrique, 1934), et il monte le stand de la publicité pour l'Exposition internationale de 1937 à Paris.

Certaines de ses créations révèlent ses préférences : Dufy pour Grandes Fêtes de Paris (1934), le surréalisme pour la campagne Reichold aux États-Unis (1942-1943).

En 1940, il est envoyé en mission aux États-Unis au titre de conseiller artistique auprès de Jean Giraudoux à la direction des services de propagande du gouvernement : il produit alors toute une série d'affiches contribuant à soutenir l'action des alliés (Stop Hitler Now, America's Answer...). À son retour en France, il apprend que ses archives ont brûlé ; il se remet alors au travail. Il innove et adopte un ton primesautier nouveau avec « L'eau qui fait Pschitt !... » (Perrier, 1949). Le slogan d'ordre auditif est rendu par une oreille gigantesque et occupe la place traditionnellement réservée au nom de marque. La période est encline aux gags graphiques, dont[...]

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Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Nelly FEUERHAHN. CARLU JEAN (1900-1997) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AFFICHE

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 6 817 mots
    • 12 médias
    À partir de 1925,Carlu, Cassandre et Loupot travaillent respectivement pour Monsavon, L'Intransigeant ou les Galeries Barbès, créant en fonction de systèmes modulaires des personnages types stylisés, représentés sur tous supports. Influencé par le purisme de Le Corbusier, qui prône de strictes...
  • GRAPHISME

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 7 454 mots
    • 3 médias
    En France, les premières affiches commerciales portant la marque de la modernité sont signées Charles Loupot, A. M. Cassandre, Paul Colin, Jean Carlu. Dans les années 1925, Carlu, Cassandre et Loupot travaillent respectivement à d'importantes commandes de la part de Monsavon, L'Intransigeant...