Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

EASY RIDER, film de Dennis Hopper

  • Article mis en ligne le
  • Modifié le
  • Écrit par

Road movie

Ce film, symbole d'un jeune cinéma indépendant, est réalisé avec un petit budget de 325 000 dollars. Devenu un classique de la contre-culture américaine, il témoigne à l'époque d'une errance visuelle. Au-delà d'un récit de voyage picaresque, il s'agit de montrer que le rêve américain relève d'un mythe. La course au bonheur utopique des années 1960 finit par déboucher sur un vide. Parcourir le temps et l'espace relève aussi de l'impossible. Dans un contexte politique lié, en 1968, à l'assassinat de Martin Luther King, à la montée de la ségrégation et au mouvement anti-guerre du Vietnam, Easy Rider dénonce l'hypocrisie et l'injustice de la société américaine, au nom du droit à la différence. Le film sera confronté à la censure à sa sortie pour ses scènes de drogue.

En fait, ce voyage revisite une conquête de l'Amérique à l'envers et à contre-histoire. Il ne s'agit plus d'affronter des Indiens, mais la réalité d'une société américaine solidement établie. Ce film dément aussi les slogans pacifistes de l'époque « faire l'amour et pas la guerre » mis en scène en 1969 dans la comédie musicale à succès Hair. L'intolérance exacerbée dans le film discrédite au contraire les conventions d'une morale puritaine dominante. Tels de nouveaux archanges, ces cavaliers contemporains traversent trois Amériques distinctes. Sous des contre-jours artistiques et souvent stylisés défilent les paysages urbains de Los Angeles, les déserts sauvages de l'Arizona puis l'univers provincial et violent des États sudistes. Un fond de musique folk marque le lien générationnel de cette longue errance. Tour à tour Steppenwolf avec Born to be wild (1968) en ouverture, puis Jimi Hendrix ponctuent ce voyage sans but. La bande son, pourtant alors peu mixée et sans effets de dolby stéréo, devient le ciment d'un film éclaté.

Easy Rider développe une réflexion impressionniste sur la violence inhérente de la société américaine. Parcourir les grands espaces ne renvoie pas ici à une forme de liberté, mais aboutit à la mort. Le rêve américain est devenu une fuite en avant. En 1969, Easy Rider se situe au carrefour de ce qu'incarnent, à d'autres époques, La Fureur de vivre de Nicholas Ray et plus récemment Thelma et Louise (Thelma and Louise, 1991) de Ridley Scott. Sur un même mode, ces films décrivent l'errance mortelle. Mais Easy Rider sera porteur, dans l'après-68 et au-delà des États-Unis, d'une forme d'identification culturelle pour toute une génération contestataire.

— Kristian FEIGELSON

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : maître de conférences, sociologue à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

Classification

Pour citer cet article

Kristian FEIGELSON. EASY RIDER, film de Dennis Hopper [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • HOPPER DENNIS (1936-2010)

    • Écrit par
    • 815 mots

    Attachant et contradictoire, Dennis Hopper fut un personnage aux multiples facettes. S'il a exercé au cinéma en tant qu'acteur et réalisateur, il a été également un photographe inventif et un peintre original, comme l'a montré en 2008 une belle exposition de la Cinémathèque française....

  • NICHOLSON JACK (1937- )

    • Écrit par
    • 1 523 mots

    C'est avec Easy Rider, de Dennis Hopper (1969), après dix ans de carrière et une trentaine de rôles au cinéma et à la télévision, que Jack Nicholson rencontre la célébrité. Ce film-culte de la jeunesse des années 1970 et 1980 constitue un tournant dans l'histoire du cinéma américain. Il va également...