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CELSE (IIe s.)

Auteur d'un grand ouvrage contre le christianisme, le Discours véritable (Alêthês Logos), composé vers 178, Celse est pratiquement inconnu. Son livre est perdu, mais on peut le reconstituer presque intégralement grâce à la réfutation qu'en fit Origène vers 248, qui le suit pas à pas et le cite largement. Il révèle un esprit cultivé, très au courant de la littérature et de la philosophie grecques : platonicien (le moyen platonisme du iie s.), l'auteur est tout autant imprégné de stoïcisme, voire d'épicurisme. Il connaît bien également l'Ancien et le Nouveau Testament et quelques écrits chrétiens.

Sa critique, souvent pénétrante, est vigoureuse et parfois violente. À ses yeux, l'enseignement des chrétiens n'est que sottise et immoralité. Leur doctrine, d'origine « barbare », n'apporte rien de neuf ; les religions et les traditions païennes l'emportent sur elle par leur ancienneté. Les récits de la Bible ne sont que des fables grossières : ainsi la naissance virginale, les miracles, qui ne sont que magie, la résurrection, qui n'est qu'une fable due à une femme hystérique et à quelques fanatiques. L'Incarnation est une absurdité : que Dieu soit descendu dans le monde supposerait un changement dans le Dieu immuable. Le pardon des péchés et la préférence prêtée au Christ pour les pécheurs scandalisent Celse. Les chrétiens, incapables de raisonner leur foi, répandent leur doctrine chez les femmes, les enfants, les ignorants ; et pourtant ils ont la sottise de se croire le centre du monde, objets de la préférence divine, détenteurs de la plus haute révélation. La résurrection lui est inacceptable, comme à tout Grec. Il s'en prend aussi au culte chrétien, à son refus des sacrifices.

Surtout Celse voit dans le christianisme un grave danger pour la sécurité de l'État : les chrétiens sont, comme le Christ lui-même, des révoltés et des fanatiques ; ils appartiennent à deux patries, ils se tiennent à l'écart de la vie de la cité, au lieu de prendre part à la vie publique et de servir l'empereur en combattant dans l'armée si la défense des lois et de la patrie le requiert.

Ainsi Celse combat le christianisme au nom de valeurs incontestables qu'il croit compromises par la religion nouvelle : l'ordre établi, les traditions religieuses et culturelles, la littérature et la philosophie, la civilisation et l'État. Au nom de la raison (logos) et de l'antique tradition (nomos), il refuse la conception chrétienne de la révélation, révélation du Logos dans l'histoire du salut. Le christianisme lui apparaît comme un hellénisme dévié et déformé, un monde sans logos, où le nomos se dissout dans l'histoire. Au-delà de la polémique contre les miracles ou les « contradictions » de la Bible, c'est sans doute là le fond de la pensée de Celse, par quoi son sectarisme conservateur s'oppose le plus vigoureusement au christianisme, dont il méconnaît le caractère essentiellement historique.

Peu lu, semble-t-il, dans l'Antiquité, le Discours véritable cependant, soixante ans après sa parution, paraissait encore assez dangereux à Ambroise, l'ami d'Origène, pour qu'il en demande à celui-ci une réfutation détaillée. Le Contre Celse, en huit livres, est une apologie monumentale, une vaste synthèse de la religion et de la vie chrétiennes.

— Pierre Thomas CAMELOT

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Pierre Thomas CAMELOT. CELSE (IIe s.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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