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DURRUTI BUENAVENTURA (1896-1936)

Peu d'hommes ont autant que Buenaventura Durruti résumé par leur destinée la part insurrectionnelle d'une époque. Il eut la sincérité de la vivre et l'habileté de la mener sans prétendre la gouverner. Son nom reste attaché aux tentatives les plus radicales de la révolution espagnole et au mouvement anarchiste, qui prêta ses revendications les plus soucieuses d'humanité au « dernier soulèvement prolétarien ».

Né à León, Durruti passe rapidement de l'école à l'atelier de mécanique, puis à la mine et à la Compagnie des chemins de fer du Nord. Membre de l'Union générale des travailleurs (U.G.T.), il se fait connaître par ses interventions et sa détermination. Lors des grèves de 1917, il passe à la Confédération nationale du travail (C.N.T.), qu'il ne quittera plus. Exilé à Gijon par la répression, il rencontre Manuel Buenacasa, qui l'initie aux théories anarchistes. Refusant le service militaire, il part pour Paris, rencontre Sébastien Faure, Louis Lecoin et Émile Cottin. En 1920, l'atmosphère révolutionnaire l'attire à Saint-Sébastien, où il adhère au groupe anarchiste dénommé Les Justiciers. Il arrive à Saragosse alors qu'une grève générale a contraint le gouverneur à libérer l'anarchiste Ascaso, qu'il avait fait emprisonner. Dans le même temps, le cardinal Soldevila engage un groupe de tueurs pour en finir avec les militants de la C.N.T. Contre les pistoleros, Durruti organisera la lutte avec Ascaso, García Oliver et les membres du groupe Les Solidaires. En réponse à l'assassinat du militant Salvador Segui, ils exécutent le cardinal Soldevila à Saragosse, puis l'ex-gouverneur de Bilbao, responsable du gangstérisme patronal. L'agitation va de pair avec la préparation d'une insurrection à Barcelone, que l'arrivée tardive des armes fit échouer. En septembre 1923, Primo de Rivera s'assurait du pouvoir, déterminant Durruti à s'exiler de nouveau en France, puis à Cuba, où, avec Ascaso et Jover, il commence une campagne d'agitation. L'exécution d'un patron qui avait fait torturer trois ouvriers grévistes les contraint à gagner le Mexique, puis à parcourir l'Amérique du Sud avant de regagner la France, où ils sont arrêtés sous l'accusation d'avoir comploté contre la vie d'Alphonse XIII. L'Argentine et l'Espagne réclament l'extradition des trois anarchistes. Lecoin et Faure obtiennent de Poincaré la libération de Durruti, Ascaso et Jover, qui sont expulsés de France et qui, voyant toutes les frontières se fermer, n'ont d'autre recours que de revenir clandestinement dans les environs de Paris. En 1928, ils passent en Allemagne, assurés de l'appui d'Eric Mühsam. De faux papiers leur permettent de rester en Belgique jusqu'en 1931, alors que l'avènement de la république espagnole autorise des espoirs, rapidement déçus. À Barcelone, Durruti, dépourvu de grands talents oratoires, mesure sa puissance de conviction en incitant, lors d'une émeute, les soldats à tourner leurs armes contre la garde civile. Sa popularité s'accroît dans le mouvement ouvrier, avec, pour contrepartie, une série d'emprisonnements.

Lors du congrès de la C.N.T. du 1er mai 1936, la conspiration militaire est dénoncée sans que le gouvernement de Front populaire se décide à réagir. À l'instigation de Durruti et de ses amis, la C.N.T. s'empare des armes contenues dans quelques bateaux du port. Lors de l'insurrection nationaliste du 19 juillet 1936, l'intervention rapide des milices anarchistes décide d'une victoire que le gouvernement de la Généralité de Catalogne eût été bien en peine d'assurer. La prédominance ainsi acquise par la C.N.T. va disparaître à la suite d'une sorte de réflexe légaliste ou de sous-estimation de soi, qui amène la C.N.T. et la F.A.I. (Fédération anarchiste[...]

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Raoul VANEIGEM. DURRUTI BUENAVENTURA (1896-1936) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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