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BLACK POWER

Tommie Smith et John Carlos - crédits : John Dominis/ The LIFE Picture Collection/ Getty Images

Tommie Smith et John Carlos

C'est en 1966 que Stokely Carmichael, président du SNCC (Student Non-Violent Coordinating Committee), diffuse l'expression de Black Power ou pouvoir noir. Il n'est plus possible en effet d'attendre qu'on applique les lois, ni de se contenter de la promotion de quelques Noirs au sein de la société blanche américaine. Toute la communauté noire est alors incitée à lutter pour sa propre promotion, la coopération véritable entre les races ne s'avérant possible que dans l'égalité. Le premier objectif du Black Power est donc d'amener la communauté noire, d'une part à prendre conscience de ce qu'elle est, de ses racines, de son histoire, de sa culture, d'autre part à définir ses propres buts et à prendre la direction d'organisations spécifiques. À ces conditions seulement, les Noirs peuvent coopérer avec la société dominante aux États-Unis, en la transformant et en rejetant ceux de ses principes qu'ils jugent racistes. Par des pressions économiques et politiques, ils doivent contrôler les institutions là où ils sont majoritaires (dans les ghettos des villes et dans certains comtés du Sud), ou participer au contrôle en proportion de leur force là où ils ne sont pas majoritaires. Cette doctrine se distingue de celle du séparatisme, prôné par les Black Muslims, qui refusent tout contact avec les Blancs et dont certains ont même demandé la création d'une nation noire. Précurseur du Black Power, Malcolm X s'était séparé des Black Muslims et avait préconisé une action politique et sociale au sein de son organisation de l'Unité afro-américaine. Avant d'être assassiné en 1965, il avait suggéré que les Noirs s'appuient sur la force pour réclamer leur dû. L'un des principes du Black Power est en effet d'opposer à la violence la contre-violence, mais en s'appuyant sur la légalité (notamment sur le droit constitutionnel de porter une arme). Cette idée est reprise par le Black Panther Party, créé en 1966 par Bobby Seale et Huey Newton à Oakland, faubourg de San Francisco. Ces derniers soulignent dans leur programme que les Noirs doivent s'armer pour se défendre. Rejoints au printemps de 1967 par Eldridge Cleaver, ils se rendent célèbres par leurs patrouilles dans les ghettos, armés de mitraillettes, portant bérets et vestes noirs en vue de protéger leurs frères de couleur contre les brutalités de la police. Le SNICK de Carmichael, puis de Rap Brown se montre alors très actif, et le CORE (Congress of Racial Equality) devient plus radical sous la conduite de son nouveau président, Floyd McKissick.

Cependant, la répression s'organise : les Black Panthers devenant l'ennemi principal de la police fédérale, leurs leaders sont arrêtés et abattus ; leurs troupes sont contrôlées par les policiers qui parviennent à s'y infiltrer.

Marche pour les droits civiques, 1963 - crédits : National Archives

Marche pour les droits civiques, 1963

L'assassinat de Martin Luther King en avril 1968 prive les Noirs américains du seul leader qui pouvait parler au nom du plus grand nombre ; et la coalition des Blancs libéraux qui le soutenaient s'est évanouie.

L'action des leaders révolutionnaires se poursuit jusqu'en 1970-1971, surtout sensible dans les grandes villes et marquée par une forte tendance révolutionnaire. Sous l'influence de la guerre du Vietnam, les mouvements noirs se déclarent solidaires des peuples du Tiers Monde, mais bientôt des divisions profondes les atteignent, notamment chez les Black Panthers en 1971. Les leaders évoluent de façon différente : Stokely Carmichael fait retraite en Guinée avant de revenir aux États-Unis en 1973 pour prôner le retour des Noirs en Afrique ; E. Cleaver se réfugie à Cuba, puis en Algérie, d'où il prône la guérilla urbaine ; d'autres passent de nombreuses années en prison. Le mouvement se replie sur des actions locales à travers lesquelles certains essayent encore de mettre en application[...]

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Écrit par

  • : diplômée d'études supérieures de science politique, chargée d'études à la direction de la Documentation française

Classification

Pour citer cet article

Martine MEUSY. BLACK POWER [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Tommie Smith et John Carlos - crédits : John Dominis/ The LIFE Picture Collection/ Getty Images

Tommie Smith et John Carlos

Marche pour les droits civiques, 1963 - crédits : National Archives

Marche pour les droits civiques, 1963

Autres références

  • MEXICO (JEUX OLYMPIQUES DE) [1968] - Le Black Power

    • Écrit par Pierre LAGRUE
    • 2 335 mots

    Le 16 octobre 1968 se déroule sur le stade olympique le 200 mètres masculin, qui constitue l'un des temps forts des Jeux de Mexico. En effet, on s'attend à voir une des barrières du sprint tomber, celle des 20 secondes sur la distance. En fait, un homme a déjà couru en moins de 20 secondes : l'Américain...

  • BALDWIN JAMES (1924-1987)

    • Écrit par Michel FABRE, Liliane KERJAN
    • 1 290 mots
    • 1 média

    Durant vingt années, James Baldwin a été le prophète inspiré du mouvement pour les droits civiques, analysant les frustrations de ses congénères et les préjugés raciaux des Blancs, faisant appel à la conscience morale de son pays tout en le menaçant de la révolution. Intégrationniste avant d’être...

  • BROWN JAMES (1928 ou 1933-2006)

    • Écrit par George LIPSITZ
    • 1 166 mots
    • 1 média
    ...la « révolution noire » et aux luttes pour les droits civiques, notamment les chansons Say It Loud-I'm Black and I'm Proud (1968), qui devient l'hymne du Black Power, Don't Be a Drop-Out (1966) et I Don't Want Nobody to Give Me Nothin' (Open Up the Door, I'll Get It Myself...
  • CARMICHAEL STOKELY (1942-1998)

    • Écrit par Universalis
    • 545 mots

    Militant pour les droits civiques et un des protagonistes des mouvements noirs aux États-Unis dans les années 1960, Stokely Carmichael était né le 29 juin 1941 à Port of Spain (Trinité-et-Tobago).

    Il s'établit à New York en 1952. Après avoir poursuivi sa scolarité dans le Bronx, il est...

  • DAVIS ANGELA (1944- )

    • Écrit par Paul LEPIC
    • 1 538 mots
    • 1 média

    Icône mondiale des luttes de la jeunesse des années 1970, membre du Black Panther Party puis du parti communiste des États-Unis d’Amérique, poursuivie pour complicité de meurtre de 1970 à 1972, deux fois candidate à la vice-présidence américaine, Angela Davis est une militante et une universitaire...

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Voir aussi