Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SAVINIO ALBERTO (1891-1952)

<em>L’Annonciation</em>, A. Savinio - crédits : AKG-images

L’Annonciation, A. Savinio

L'œuvre d'Alberto Savinio couvre pratiquement la première moitié du xxe siècle. Savinio fut à la fois acteur et spectateur des deux guerres les plus meurtrières que connut l'humanité : témoin de l'effondrement d'un monde et de ses valeurs, témoin de ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui une crise de civilisation. Ceci explique cela, et si son œuvre est disparate, c'est qu'elle est l'expression de cette crise. Sa quête à travers les méandres de la culture humaine, que celle-ci soit étrusque, égyptienne, hébraïque, grecque, romaine ou nordique, est la quête de l'homme moderne en proie à l'angoisse, partant à la recherche de son identité et à la découverte de valeurs nouvelles adaptées au monde d'aujourd'hui. Ces valeurs, Savinio les découvre et les concentre dans une nouvelle synthèse incarnée dans un univers poétique.

Dans la constitution de cet univers, la Grèce joue un rôle prépondérant, car c'est à Athènes que naquit Savinio et qu'il passa son enfance et son adolescence. La Grèce le marqua donc profondément et il n'est guère de ses écrits qui ne fassent référence à la Grèce actuelle et plus encore à la Grèce antique. Les dieux de l'ancienne Grèce peuplent ses récits et reprennent une vie parfois étrange sous sa plume. À travers toutes les mythologies, Savinio se fraye un chemin et crée sa propre mythologie, nourrie d'une force poétique si vigoureuse qu'André Breton a pu dire de lui, dans son Anthologie de l'humour noir, que « tout le mythe moderne encore en formation s'appuie à son origine sur les deux œuvres, dans leur esprit presque indiscernables, d'Alberto Savinio et de son frère Giorgio de Chirico ». Cette déclaration suffirait à elle seule à justifier l'étiquette d'écrivain métaphysique que Savinio ajoutait à son nom.

La vie et l'œuvre

C'est à Athènes, le 25 août 1891, que naquit Savinio. Grec d'adoption, son vrai nom était Andrea de Chirico. Son père était un ingénieur ferroviaire florentin ; d'où l'importance que prennent souvent les trains et les gares dans son œuvre. Son frère, le célèbre peintre, fut lui aussi fortement inspiré par l'activité de son père, puisqu'il est connu comme le peintre des gares. Et de la même manière que Giorgio créa la peinture métaphysique, Andrea créa l'écriture métaphysique.

Au conservatoire de sa ville natale, le jeune Savinio étudia le piano et la composition. Après la mort de son père en 1905, il partit rejoindre Max Reger à Munich pour se perfectionner. À quinze ans, il avait déjà composé Carmela, et ne cessera par la suite de produire des œuvres musicales : La Vita dell'uomo (La Vie de l'homme), 1946 ; Orfeo Vedovo (Orphée veuf), 1950 ; Cristoforo Colombo (Christophe Colomb), 1952, mais aussi Notte tinta (Nuit teintée), Le Fanal d'épiderme, pièces jamais exécutées dont la musique est inédite.

L'œuvre de Savinio se révèle d'emblée particulièrement riche et son activité artistique s'exerce dans de nombreux domaines. La musique, la littérature, la peinture ou la mise en scène sont autant de disciplines dans lesquelles ses talents s'expriment.

Peu à peu, cependant, la littérature et la peinture prirent le pas sur la musique. L'intérêt de Savinio pour celle-ci n'en continua pas moins à se manifester au gré de textes critiques dont la plupart ont été rassemblés et édités en recueil : Scatola sonora (Boîte sonore). En 1915, la guerre interrompit ses activités et il partit combattre en Macédoine. Au lendemain de la guerre, il publia Hermaphrodito (Hermaphrodite, 1918). Au moment de sa parution, le livre tomba dans l'indifférence générale et seuls quelques initiés et amis surent, comme Apollinaire, Cocteau ou Breton, apprécier l'œuvre à sa juste valeur.[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Christian CHALMÉ. SAVINIO ALBERTO (1891-1952) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

<em>L’Annonciation</em>, A. Savinio - crédits : AKG-images

L’Annonciation, A. Savinio

Autres références

  • DE CHIRICO GIORGIO (1888-1978)

    • Écrit par Gérard LEGRAND
    • 1 728 mots
    Quand l'Italie entre en guerre, De Chirico regagne sa patrie. Mobilisé, maintenu à Ferrare, il y retrouve son frère, Alberto Savinio (1891-1952), peintre et poète : l'influence réciproque de ces deux personnalités pose un problème qui est loin d'être résolu. Dans l'immédiat, leurs conversations aboutissent...
  • ITALIE - Langue et littérature

    • Écrit par Dominique FERNANDEZ, Angélique LEVI, Davide LUGLIO, Jean-Paul MANGANARO
    • 28 412 mots
    • 20 médias
    ...suoifigli, 1930 ; Gente nel tempo, 1937) sont une illustration de ce courant qui compte d’autres écrivains de tout premier plan comme, par exemple, Alberto Savinio (pseudonyme d’Andrea De Chirico), frère de l’artiste Giorgio De Chirico, et lui-même peintre. Proche du surréalisme, grand lecteur...

Voir aussi