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ACCENT, linguistique

On rencontre sous la rubrique « accent » des phénomènes très divers, ce qui est souvent source de confusion. En général, il s'agit de phénomènes d'ordre phonique qui consistent à donner un certain relief à telle ou telle partie de la chaîne parlée (syllabe, mot, syntagme, etc.) en faisant contraster un segment particulier avec le reste de l'énoncé. Cette mise en relief peut être réalisée par des moyens variés qui se présentent toujours comme plus ou moins liés entre eux : intensité, durée, hauteur. Elle affecte essentiellement les voyelles (éléments « voisés » par excellence, donc susceptibles d'être modulés), mais cela ne signifie pas que la voyelle — ou la syllabe — soient les seules unités linguistiques pouvant être accentuées : ce sont simplement celles où se manifeste la réalité physique du phénomène accent.

La question de savoir quelles fonctions peut remplir l'accent reste assez complexe (comme du reste l'ensemble des problèmes prosodiques). En effet, les diverses langues utilisent de manière fort différente les phénomènes accentuels. La fonction contrastive paraît néanmoins centrale car l'accent, dans tous les cas, a pour effet d'établir un contraste, que ce soit un contraste syntagmatique (entre tel fragment de l'énoncé et le reste de l'énoncé), ou un contraste paradigmatique (entre l'élément accentué dans l'énoncé et tous ceux qui auraient pu occuper la même position ; ce qui est une manière d'indiquer que c'est cet élément-là et nul autre qui figure dans l'énoncé).

Certaines langues ont, au niveau du mot, des schémas accentuels fixes : accent sur la première syllabe (tchèque, hongrois), sur la dernière (c'est la tendance du français), sur l'avant-dernière (polonais)... La fonction démarcative (permettre de repérer les limites du mot) est alors au premier plan. D'autres langues, où la place de l'accent est variable, utilisent cette place comme unité distinctive : la même séquence de phonèmes accentuée différemment aura des significations distinctes (ainsi en anglais index, un index, et index, le verbe indexer) et la répartition des accents aura alors la même fonction que des éléments phonologiques. Pour ces langues (dont le russe et l'anglais) certaines régularités dans la distribution des accents permettent de prévoir la façon dont la plupart des mots seront accentués.

L'accent a souvent aussi une fonction qu'on appelle culminative : il permet de repérer, dans un énoncé qui peut être long, les quelques nœuds réellement importants pour la transmission du message. Par les contrastes qu'il introduit, l'accent contribue à indiquer les limites (ou bornes, ou frontières) des constituants ainsi que les rapports hiérarchiques qui peuvent exister à l'intérieur d'un constituant. Ainsi l'anglais black bird (oiseau noir) et blackbird (merle). L'accent détermine aussi pour certaines langues une répartition à l'intérieur des voyelles selon qu'elles apparaissent en position accentuée ou inaccentuée (elles sont alors réduites à un tout petit nombre d'oppositions). En français, où l'accent de mot est faible, il ne modifie pratiquement pas le timbre des voyelles inaccentuées.

Une autre fonction de l'accent, expressive, consiste à indiquer une attitude subjective ou affective par l'insistance mise sur un élément particulier (par exemple, en français, en prolongeant l'articulation de la première consonne du mot).

Le langage courant parle également d'accent pour désigner les caractéristiques phonétiques propres au parler d'une communauté ou d'un groupe donné (national, régional, social) : accent québécois, alsacien, seizième, slave, etc. Ces caractéristiques font intervenir intonation, rythme, répartition des accents de mot ou de phrase, articulation[...]

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Pour citer cet article

C.-H. VEKEN. ACCENT, linguistique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • EMPHASE

    • Écrit par Robert SCTRICK
    • 263 mots

    Procédure qui semble être le simple produit de la fantaisie du locuteur, et, comme telle, ne nécessiter aucun traitement particulier, l'emphase, ou accentuation au moyen de divers procédés phoniques, syntaxiques ou stylistiques, peut néanmoins faire l'objet d'une étude particulière, dans la mesure...

  • FRANCE (Arts et culture) - La langue française

    • Écrit par Gérald ANTOINE, Jean-Claude CHEVALIER, Loïc DEPECKER, Françoise HELGORSKY
    • 15 699 mots
    • 2 médias
    L'accent tonique, extrêmement fort en latin vulgaire et jusqu'au xie siècle, est responsable d'une véritable érosion phonétique qui ruine les flexions et réduit la plupart des mots à une ou deux syllabes (par exemple, oculum > œil ; hospitem > hôte). Les voyelles qu'il frappait...
  • MÉTRIQUE

    • Écrit par Benoît de CORNULIER
    • 6 930 mots
    • 1 média
    ...de l'unité rythmique, comme en supplément (statut non conclusif des syllabes féminines, voire plus généralement post-accentuelles) ; d'où le fait que l' accent terminal ainsi que l'abaissement ou l'élévation mélodique marquant l' intonation d'une expression se portent sur l'avant-dernière syllabe plutôt...
  • ORTHOGRAPHE

    • Écrit par Liselotte BIEDERMANN-PASQUES, Fabrice JEJCIC
    • 4 616 mots
    • 1 média
    La modernisation de la notation des voyelles en français passe par l'introduction d'un système d'accentuation, qui n'existait pas en latin. L'accentuation introduite aux xvie et xviie siècles par les réformateurs et par des écrivains modernes (Ronsard dans Les Odes, 1550,...
  • Afficher les 11 références

Voir aussi