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THINK TANKS

Expansion mondiale

Le succès apparent des think tanks américains et britanniques dans la conversion de l'élite politique aux idées conservatrices et néolibérales au cours des années 1970 et 1980 va entraîner une véritable explosion du phénomène sur tous les continents. Les grands think tanks conservateurs américains y sont pour quelque chose puisque certains d'entre eux vont activement essaimer en Amérique latine, en Asie, et plus tard, après la chute du Mur de Berlin, en Europe orientale et centrale. On estime aujourd'hui qu'il y a environ quatre mille think tanks dans le monde et jusqu'à mille deux cents aux seuls États-Unis, la plupart datant de la période la plus récente.

Le think tank américain Fondation Atlas pour la recherche économique (Atlas Economic Research Foundation), qui a été fondé en 1981 par l'entrepreneur britannique Antony Fisher et qui s'est donné pour mission d'établir des think tanks conservateurs partout dans le monde, estime que le nombre de think tanks défendant la même vision que lui de l'économie de marché et de la démocratie libérale s'élève à cinq cents dans le monde, avec, par exemple, quatre-vingt-dix-neuf en Europe (dont sept en Pologne et six en Espagne) et dix-sept sur le continent africain. En France, l'Association pour la liberté économique et le progrès social (fondée en 1966 par Jacques Rueff et d'autres membres de la Société du Mont-Pèlerin) et l'Institut Turgot fondé en 1990 se situent, entre autres, dans cette mouvance.

La vague de création de think tanks conservateurs et/ou défendant l'économie de marché a été suivie depuis les années 1990 par l'émergence de nouveaux think tanks, plus proches des oppositions de gauche ou de centre gauche, qui critiquent l'hégémonie du « consensus de Washington » ou qui veulent rompre avec tout ou partie de l'héritage intellectuel néolibéral. Le Royaume-Uni voit ainsi apparaître des clubs de réflexion qui vont accompagner ou encourager la transformation du travaillisme britannique en New Labour, sous la direction d'Anthony Blair : c'est le cas de Demos, fondé en 1993, qui a revendiqué un temps sa proximité envers le gouvernement Blair pour ensuite se positionner dans un espace « postmoderne » au-delà du clivage gauche-droite. L'Institut de recherche en politiques publiques (Institute for Public Policy Research, 1988) qui, avec un staff permanent d'une cinquantaine de personnes, est un des plus gros think tanks de sa génération, a voulu jouer auprès du New Labour le même rôle que l'Institut Adam Smith ou l'Institut des affaires économiques ont revendiqué auprès des gouvernements successifs de Margaret Thatcher, à la fois conseiller pratique et éclaireur utopiste.

En France, la Fondation Copernic créée en 1998 ou le conseil scientifique de l'association Attac, fondée la même année, bien plus marqués à gauche que leurs homologues britanniques, ont incarné les fonctions de contestataires scientifiques d'un consensus économique jugé par trop libéral. Sur le plan international, le Forum social mondial (2001), un talk tank altermondialiste, a joué un temps ce rôle de critique radical des positionnements de son alter ego libéral, le Forum économique mondial de Davos (1971). Au cours de la décennie de 2000, la mouvance socialiste française s'est dotée d'organismes très proches dans leur inspiration des think tanks néo-travaillistes britanniques, avec lesquels ils entretiennent des rapports fraternels, en particulier par le biais de Policy Network, un think tank blairiste créé à Londres en 2000 qui nourrit des ambitions internationales de diffusion de la pensée « progressiste ». Le précurseur en ce domaine a été la Fondation Saint-Simon, fondée en 1982 par l'historien François Furet, associé notamment à Roger Fauroux,[...]

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Pour citer cet article

Keith DIXON. THINK TANKS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • FABIAN SOCIETY ou SOCIÉTÉ FABIENNE

    • Écrit par Roland MARX
    • 978 mots
    • 1 média

    Les « Fabiens » constituent depuis 1884 le plus célèbre club de pensée socialiste en Angleterre. Gros de quelques centaines de membres dans les années 1890, il en compte 2 462 en 1909, dont plus de la moitié sont des Londoniens. Ce nombre a plus que doublé à notre époque. Depuis sa naissance, on...

Voir aussi