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CHEVALERIE ORDRES DE

Les chevaliers des premiers âges médiévaux, élevés dans le combat et pour le combat, ne connaissaient guère de limites à leurs impulsions barbares. Les guerres féodales décimaient noblesse et paysannerie, entretenaient le désordre et l'anarchie, ravageaient les récoltes déjà insuffisantes pour nourrir la population, entraînaient le pillage et la ruine des établissements ecclésiastiques. L'Église réagit : elle mena la chevalerie à la reconquête des lieux saints en Palestine, à l'assaut des royaumes musulmans en Espagne ; cette turbulence était canalisée vers une cause sainte, la défense de la chrétienté. C'est pour soutenir cette cause que sont fondés les premiers ordres de chevalerie, mêlant à l'instinct belliqueux l'idéal monastique qui moralise la chevalerie dans son ressort essentiel, la guerre. Les premiers ordres, français et espagnols, sont constitués en communautés, ascétisme et prière purifiant l'épée destinée à pourfendre le « païen », l'identifiant au glaive de l'archange saint Michel transperçant le dragon. Les défaites en Terre sainte, l'enrichissement de l'Occident et la déviation de l'idée même de croisade vers des causes aussi douteuses que le pillage de la Constantinople chrétienne transformèrent les ordres de chevalerie en puissances financières et, par là même, politiques. Là est l'origine de leur décadence. De cette transformation périt l'ordre du Temple. Au xive siècle, de nouveaux ordres apparaissent en grand nombre, toujours dans la perspective d'une croisade, toujours dotés d'un idéal de sacrifice et de pureté, toujours voués à la prière et à la mortification. Mais l'élan des croisades est définitivement brisé, les mortifications sont dédiées à une dame plus souvent qu'à Dieu, fêtes et tournois prennent le pas sur la prière. Le crépuscule du Moyen Âge transforme les ordres de chevalerie en cercles aristocratiques où s'élabore un art de vivre, un langage allégorique, une imagerie littéraire ou graphique qui transpose dans l'illusion la geste chevaleresque. Pourtant, entre les chevaliers de Saint-Jean ou de Saint-Jacques et leurs cadets, ordres anglais de la Jarretière, français de l'Étoile, bourguignon de la Toison d'or, il n'y a pas de solution de continuité, il n'y a que l'évolution d'une institution dont la mission a échoué. La fête baroque, le roman galant naissent du désenchantement d'une noblesse qui voit déjà grimacer dans son miroir la silhouette dégingandée de don Quichotte de la Manche.

— Solange MARIN

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Pour citer cet article

Solange MARIN. CHEVALERIE ORDRES DE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ORDRES MILITAIRES (XIIe- XIVe SIÈCLES) - (repères chronologiques)

    • Écrit par Pascal BURESI
    • 358 mots

    1113 Le pape Pascal II reconnaît l'hôpital de Saint-Jean de Jérusalem comme ordre hospitalier indépendant.

    1120 Hugues de Payns fonde une milice pour protéger les pèlerins. Installés à Jérusalem dans la mosquée al-Aqsā, située sur le site du Temple de Salomon, ils prennent le nom de...

  • CHEVALERIE

    • Écrit par Georges DUBY
    • 2 485 mots
    ...d'un patron, mais du Seigneur. Cette conception se reliait étroitement à l'idée de guerre sainte, donc à la croisade ; elle aboutit à la création des ordres religieux militaires, la nova militia qu'exalta saint Bernard ; les chevaliers du Temple ou de l'Hôpital, ceux de Santiago, les chevaliers...
  • CI-DEVANT

    • Écrit par Jean TULARD
    • 519 mots

    L'expression de ci-devant se dit fréquemment au xviie et au xviiie siècle des personnes et des choses dépossédées de leur état ou de leur qualité. Le terme en vint à désigner pendant la Révolution les anciens nobles.

    Si Chateaubriand a pu dire que « les plus grands coups portés...

  • ESPAGNE (Le territoire et les hommes) - Des Wisigoths aux Rois catholiques

    • Écrit par Marcelin DEFOURNEAUX
    • 6 354 mots
    • 7 médias
    ...idées, des formes d'art ; par les « ports » pyrénéens passent barons et chevaliers qui viennent apporter leur appui à la lutte contre l'Infidèle ; des ordres religieux et militaires (Calatrava, Saint-Jacques, Alcantara) se créent sur le modèle des milices monastiques (Templiers, Hospitaliers) qui combattent...
  • ÉTOILE ORDRE DE L'

    • Écrit par Claude DUCOURTIAL-REY
    • 273 mots

    Le plus ancien ordre de chevalerie français historiquement attesté ; créé par le roi Jean le Bon le 16 novembre 1351, au début de la Guerre de Cent Ans, son nom lui vient de ses insignes : un anneau dont le chaton figurait une étoile émaillée, timbrée d'un soleil d'or, et un « fermail » de même...

  • Afficher les 13 références

Voir aussi