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LA REYNIE GABRIEL NICOLAS DE (1625-1709)

Le premier lieutenant de police de Paris. Né à Limoges d'une famille de robe pauvre et mal pourvue, Gabriel Nicolas fait un riche mariage en 1645 et prend alors le nom de La Reynie, médiocre fief de 200 livres de revenu annuel. Magistrat au présidial d'Angoulême puis président à celui de Bordeaux, il résiste à la Fronde, sert d'intendant au gouverneur de Guyenne, le duc d'Épernon, qui le fait connaître à la cour. La Reynie administre la fortune de son patron sans oublier la sienne : en 1661, il achète pour 320 000 livres une charge de maître des requêtes au Conseil du roi. Colbert l'apprécie et le fait nommer, en 1667, lieutenant de police de Paris, fonction qui vient d'être créée. Conseiller d'État en 1680, La Reynie quittera la lieutenance de police en 1697. Une carrière originale donc, sinueuse et lente, imparfaite pour son temps car il ne fonde pas une grande famille : son fils unique en effet lui échappa très tôt pour mener à Rome, d'où il ne revint jamais, une vie d'épicurien et de dilettante. Instrument du despotisme de Louis XIV et de ses ministres, La Reynie établit son autorité sur les anciens pouvoirs : le gouverneur de Paris, grand seigneur réduit à une brillante figuration, les titulaires, laïques ou ecclésiastiques, de fiefs enclavés dans Paris, le Parlement habitué jusque-là à prendre des arrêts de règlement en matière de police, le prévôt des marchands et la municipalité parisienne, le lieutenant civil qui conserve néanmoins la préséance. En correspondance continuelle avec les ministres, parfois convoqué par le roi, La Reynie est l'homme de confiance du pouvoir central dans la capitale ; il fait servir à ses fonctions son rôle personnel de juge ou de procureur dans de grands procès extraordinaires : celui du chevalier de Rohan décapité pour conspiration, celui de l'Affaire des poisons. À la fois administrateur, policier et juge, il veille « à l'ordre et à la règle ». Il met sous sa coupe les quatre polices de Paris : les commissaires, officiers royaux parmi lesquels il distingue Delamare, son plus proche collaborateur et l'auteur d'un Traité de police, les archers et exempts du guet dont il augmente les effectifs, la compagnie du lieutenant criminel, la prévôté de l'Ile qui surveille les faubourgs. Cette nouvelle organisation permet d'assurer, la nuit, la sécurité des rues de Paris, de surveiller le milieu parisien d'alors et de le truffer d'indicateurs. La Reynie contrôle aussi les salles de jeux et de spectacles. Surtout il réprime l'impression et le colportage des écrits séditieux, crimes qu'il juge lui-même directement et très sévèrement. Chargé de l'exécution des lettres de cachet, il participe à la haute politique quand il assure le ravitaillement en blé de Paris ou quand il dirige les persécutions contre les protestants. Mais La Reynie sut toujours garder une allure de « magistrat de l'ancienne roche » (Saint-Simon) avec « beaucoup d'esprit et de manège et un grand air de gravité » (marquis de Sourches) : c'est ce qui fait sa réputation aujourd'hui encore.

— Olivier COLLOMB

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Pour citer cet article

Olivier COLLOMB. LA REYNIE GABRIEL NICOLAS DE (1625-1709) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • POLICE FRANÇAISE HISTOIRE DE LA

    • Écrit par Jean-Marc BERLIÈRE
    • 3 672 mots
    ...démontrent la volonté du pouvoir royal de mettre la main sur la police de la ville-capitale et d'introduire quelque rationalité dans ce domaine. L'habileté du premier propriétaire de la charge, Gabriel Nicolas de La Reynie, ses réussites dans des domaines variés – éradication de la cour des...