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DIDON ou ELISSA (IXe s. av. J.-C.?)

Princesse de Tyr, fondatrice de Carthage. De nombreux textes anciens attribuent la fondation de Carthage à Didon, également appelée Elissa ; sœur du roi de Tyr Pygmalion, elle quitte la Phénicie après le meurtre de son mari perpétré par son frère, relâche à Chypre, où elle recrute de nouveaux colons, conduits par le grand prêtre, arrive en Afrique, où elle obtient des autochtones la concession d'une terre. Mais le chef libyen qui l'a accueillie ne tarde pas à exiger de l'épouser ; plutôt que de consentir à cette union, Didon, au cours d'un sacrifice, se jette sur un bûcher et se donne la mort d'un coup de poignard.

Cette tradition paraît avoir été constituée pour l'essentiel dès le ~ ive siècle et nous est révélée sous sa forme la plus complète par Justin, qui abrégea au iie siècle l'Histoire universelle du Gaulois romanisé Trogue Pompée, contemporain de César. Elle semble amalgamer sous une forme romancée des éléments très divers ; il n'est nullement exclu qu'elle contienne un élément historique, emprunté aux chroniques royales de Tyr ; les cités phéniciennes étaient agitées par de fréquents troubles politiques, et la fuite d'un parti conduit par un des membres de la dynastie n'aurait rien d'invraisemblable. La date exacte de l'événement pose un problème difficile à résoudre.

À ces données historiques s'ajoutèrent, semble-t-il, des mythes « étiologiques », c'est-à-dire destinés à justifier des pratiques religieuses étranges ou choquantes. Les Carthaginois étaient fâcheusement célèbres pour leurs sacrifices de jeunes enfants. Or ceux-ci semblent dériver des autosacrifices que les rois phéniciens étaient obligés de pratiquer dans certaines circonstances graves. On racontait probablement que Didon avait été contrainte de se sacrifier elle-même pour assurer la prospérité de sa fondation. Le lieu de ce sacrifice, qui était en même temps celui du culte de la reine, paraît avoir coïncidé avec le « tophet » où l'on immolait les enfants. Ce sont les prêtres du tophet qui durent élaborer la première forme du mythe que quelque écrivain grec transforma plus tard en roman dans le goût hellénistique. Dans L'Énéide, Virgile a utilisé à sa manière le personnage légendaire de Didon : reine de Carthage, celle-ci s'éprend d'Énée, contraint par la tempête d'aborder sur le rivage africain ; elle se suicide, désespérée, lorsque Énée l'abandonne sur l'ordre de Jupiter.

— Gilbert-Charles PICARD

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Pour citer cet article

Gilbert-Charles PICARD. DIDON ou ELISSA (IXe s. av. J.-C.?) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CARTHAGE

    • Écrit par Abdel Majid ENNABLI, Liliane ENNABLI, Universalis, Gilbert-Charles PICARD
    • 9 841 mots
    • 5 médias
    Selon une tradition transmise par Timée et reprise par Justin, Carthage aurait été fondée vers 814 avant J.-C. par Elissa ou Didon, sœur du roi de Tyr, Pygmalion, accompagnée de notables tyriens fuyant leur patrie et de Chypriotes. L'historien juif Josèphe, citant Ménandre, Grec d'Asie qui avait...
  • ÉNÉE

    • Écrit par Universalis
    • 837 mots

    Prince troyen légendaire, fils de la déesse Aphrodite et du mortel Anchise, Énée joue un rôle prépondérant dans la guerre de Troie contre les Grecs, n'étant surpassé en valeur que par son cousin Hector. Dans L'Iliade, Homère suggère qu'Énée ne goûtait guère cette position subalterne,...

  • ÉNÉIDE, Virgile - Fiche de lecture

    • Écrit par Marie-Gabrielle SLAMA
    • 773 mots
    • 1 média
    ...: les chants II et III constituent donc des récits dans le récit, Énée narrant la chute de Troie et les années d'errance qui ont succédé à la défaite. Le chant IV relate les amours d'Énée et de Didon, qui s'achèvent tragiquement : passionnément éprise, Didon s'efforce en vain de retenir Énée auprès d'elle,...