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ASTATE

Élément chimique de symbole At et de numéro atomique 85, l'astate (du grec astatos, instable) a autrefois été appelé ékaiode (car ses propriétés chimiques se rapprochent de celles de l'iode, l'halogène qui le précède dans le tableau périodique) et alabame. Les Anglo-Saxons le nomment astatine.

Dernier élément du groupe des halogènes dont la place dans le tableau périodique était restée vide jusqu'en 1940, quand il fut préparé pour la première fois par D. R. Corson, K. R. MacKenzie et E. Segrè sous forme de l'isotope radioactif de masse 211 en irradiant le bismuth 209 par des particules alpha : 209Bi + 4He → 211At + 2n.

L'isotope ainsi formé se désintègre par émission alpha conduisant au bismuth 207 et au polonium 211.

On ne connaît pas d'isotopes stables de l'astate ; en revanche, 32 isotopes radioactifs ont été obtenus (191At, et de 193At à 223At), parmi lesquels 210At possède la plus longue demi-vie (8,1 h). Par la suite, des traces d'astate ont été trouvées dans les complexes des trois séries radioactives naturelles de l'uranium, du thorium et de l'actinium : 210At (demi-vie 0,10 ms) et 219At (demi-vie 56 s), descendant de 235U ; 218At (demi-vie 1,5 s), descendant de 238U. Mais la vie courte de ces isotopes ne permet pas la préparation de quantités importantes de l'élément en vue de l'étude de ses propriétés physiques et chimiques, dont certaines ont été établies par des méthodes radiochimiques. Ses températures de fusion et d'ébullition seraient, respectivement, de 302 0C et 337 0C. On estime que la quantité totale d'astate dans la croûte terrestre est constamment inférieure à 30 grammes, voire beaucoup moins. L'astate est l'élément naturel le plus rare sur Terre, ce qui explique les grandes difficultés rencontrées pour déterminer les caractéristiques physiques de cet élément. Jusqu'à présent, on ne connaissait du spectre atomique de l'astate que deux raies spectrales dans l'ultraviolet.

Une équipe internationale de physiciens travaillant auprès de l'installation de faisceaux radioactifs Isolde au Cern de Genève a réussi par spectroscopie laser à déterminer le spectre optique de l'astate près de son seuil d'ionisation. Ces mesures permettent de déduire son potentiel d'ionisation, c'est-à-dire l'énergie nécessaire pour arracher un électron à un atome d'astate. La valeur de 9,317 5 électronvolts, publiée en mai 2013 dans la revue Nature Communications, est obtenue avec une grande précision grâce à l'observation de nombreuses raies du spectre. Elle devrait aider les chimistes à réaliser des applications de cet élément qui semble parfaitement adapté à des traitements radio-pharmaceutiques très prometteurs, en particulier la méthode dite de « thérapie alpha ciblée », qui permet de bloquer la croissance de certaines cellules cancéreuses. De plus, cette mesure a été confrontée à des modèles qui calculent dans le cadre de la chimie quantique les propriétés des éléments lourds. Cela permet de prédire théoriquement le potentiel d'ionisation de l'élément 117, un élément superlourd découvert récemment et dont on pense qu'il est l'homologue de l'astate.

— Bernard PIRE

— Universalis

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis et Bernard PIRE. ASTATE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • HALOGÈNES

    • Écrit par Jacques METZGER, Robert de PAPE
    • 6 600 mots
    • 5 médias

    Éléments chimiques constituant le sous-groupe VII b de la classification périodique, les halogènes sont au nombre de cinq : le fluor (F), le chlore (Cl), le brome (Br), l' iode (I) et l' astate (At) ; précédant immédiatement chacun des gaz inertes – sauf l'hélium –, ils possèdent 7...

Voir aussi