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5-30 avril 1988

France. Premier tour de l'élection présidentielle

Le 5, Raymond Barre participe à L'Heure de vérité sur Antenne 2. Refusant de modifier le sens de sa campagne en raison de mauvais sondages, il confirme son intention, s'il est élu, de gouverner au centre.

Le 7, François Mitterrand rend publique sa Lettre à tous les Français. Ce document qui n'est pas un « programme » (c'est « l'affaire des partis »), présente « une politique pour la France » sous la forme de grandes orientations : équilibrer les institutions ; construire l'Europe ; encourager le désarmement, garantir la sécurité, agir pour la paix, le développement du Tiers Monde ; moderniser l'économie et donner une priorité à l'éducation et à la formation ; assurer la cohésion sociale ; multiplier les espaces de culture. Les réactions de la majorité sont très critiques : tandis que Raymond Barre relève « l'immobilisme affiché, le socialisme masqué et l'imprécision constante », Jacques Chirac, invité de L'Heure de vérité, juge « le projet flou, vague et surtout porteur d'immobilisme ».

Le 8, jour d'ouverture de la campagne officielle, est publiée au Journal officiel la liste des candidats à l'élection présidentielle. Ils sont neuf à avoir obtenu les cinq cents signatures d'élus : outre les trois déjà cités, Pierre Boussel (extrême gauche), Pierre Juquin (communiste rénovateur), Arlette Laguiller (extrême gauche), André Lajoinie (P.C.F.), Jean-Marie Le Pen (Front national) et Antoine Waechter (écologiste).

Le 13, Jacques Chirac, à Lyon, lors de son dernier grand meeting avant le premier tour, se montre très critique à l'égard de François Mitterrand : il met en cause sa compétence, sa bonne foi, et, de façon allusive, son âge.

Le 17, Jean-Marie Le Pen rassemble vingt mille personnes dans le stade de Marseille. Il affirme : « Nous vivants, la France ne sera jamais une république islamique », et dénonce tous les loosers de la classe politique, qui sont « responsables d'un déclin indiscutable ».

Le 19, François Mitterrand dénonce, dans un meeting à Montpellier, la « vulgarité » de Jacques Chirac, sans le nommer. Au Bourget, le 22, il souligne devant trente mille militants : « Nous ne sommes pas détenteurs de la vérité absolue » pour faire mieux passer son message d'« ouverture » politique.

Le 24, le premier tour est marqué par le morcellement de la droite en trois composantes : la droite parlementaire, qui avait obtenu près de 45 p. 100 des voix en mars 1986, tombe à 36 p. 100, avec 19,94 p. 100 pour Jacques Chirac et 16,54 p. 100 pour Raymond Barre. La poussée de l'extrême droite, qui avait obtenu 9,65 p. 100 à la proportionnelle en mars 1986, est particulièrement significative, puisque Jean-Marie Le Pen remporte 14,39 p. 100 des suffrages. François Mitterrand, avec 34,09 p. 100, devance de plus de 14 points son suivant immédiat. André Lajoinie obtient 6,76 p. 100, ce qui représente le plus faible score jamais enregistré par le Parti communiste. Antoine Waechter obtient 3,78 p. 100, Pierre Juquin ne recueille que 2,10 p. 100 des voix, Arlette Laguiller 1,99 p. 100 et Pierre Boussel 0,38 p. 100. À 18,62 p. 100, le taux d'abstention est peu élevé, comparable aux 18,90 p. 100 du premier tour de 1981.

Le soir même du scrutin, les principaux candidats font des déclarations télévisées : Raymond Barre et Jacques Chirac apparaissent côte à côte, le premier pour se désister en faveur du second. Depuis Château-Chinon, dans une courte déclaration, François Mitterrand appelle à « l'union des Français autour des valeurs de la démocratie : progrès, justice sociale, égalité des chances, finalement respect des autres ».

Le 25, le président de la République est en campagne à la Guadeloupe, où il déclare à Pointe-à-Pitre qu'il espère qu'aucun candidat responsable ne se laissera aller jusqu'à traiter avec un mouvement politique qui, à l'égard du racisme, montre tant de complaisance.

Le 27, Valéry Giscard d'Estaing annonce son soutien au « candidat unique de la majorité U.D.F. et R.P.R., Jacques Chirac ».

Le 27 également, le comité central du P.C.F. approuve à l'unanimité le rapport de Georges Marchais qui propose d'appeler à voter pour François Mitterrand au second tour tout en soulignant que cela « n'implique aucun engagement » des communistes au côté du président-candidat.

Le 28, le débat télévisé entre François Mitterrand et Jacques Chirac est suivi pendant deux heures vingt par environ trente millions de Français ; ce face-à-face, par moments extrêmement tendu, donne lieu à un éclat à propos de la lutte contre le terrorisme et de l'affaire Gordji.

Le 29, la majorité parlementaire organise un meeting commun au palais omnisports de Bercy. Raymond Barre estime que sa présence au côté de Jacques Chirac est « conforme aux règles élémentaires de loyauté et d'amitié pour ceux qui participent au combat d'un même camp ».

Le 30 sont rendus publics des propos de Charles Pasqua estimant, dans Valeurs actuelles, que, « sur l'essentiel, le Front national se réclame [...] des mêmes valeurs que la majorité ». Cette déclaration suscite des remous dans la classe politique, à gauche, mais aussi dans la majorité.

—  ENCYCLOPÆDIA UNIVERSALIS

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