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WINDGASSEN WOLFGANG (1914-1974)

Le ténor tant attendu, pilier du Nouveau Bayreuth, fondé avec lui et impensable sans lui, Wolfgang Windgassen avait trente-sept ans quand il fit ses débuts dans le Festspielhaus en juillet 1951. Son père Fritz Windgassen, ténor de format estimable, appartenait à la troupe de Stuttgart. Sa mère, chanteuse légère, était la propre sœur de Eva von der Osten, créatrice de Quinquin dans Le Chevalier à la rose, et une des premières femmes régisseurs de l'époque. La guerre avait condamné à la lenteur, et même à l'immobilité, une carrière qui démarrait sagement à Pfrozheim, dès 1939. La chance de Windgassen fut sans doute là.

Authentique ténor, au timbre clair et au métal brillant (à la différence de tant de wagnériens qui ne sont que des barytons montés en graine), ses dons réels ne le destinaient guère à des emplois plus lourds et larges que Lohengrin, Walther des Maîtres chanteurs, Parsifal. Mais pour rouvrir Bayreuth, pour que Wieland Wagner pût y accomplir sa révolution théâtrale, il fallait pourvoir aux rôles de ténors. Lorenz était en bout de carrière, Vinay (ex-baryton, et qui allait le redevenir) achevait de consumer dans Tristan et Tannhäuser un vrai génie de musicien. Tous les autres, pendant quinze ans, ne méritaient que les secondes places. Il appartint à Windgassen de prendre la première. Il n'est pas exagéré de dire que Bayreuth lui doit tout. Il y chantait jusqu'à Loge et Froh. On lui reprocha beaucoup, à l'époque, de n'être pas Melchior, dont en effet il n'avait pas l'endurance : dans Tristan ou Tannhäuser, ouvrages à la limite de ses moyens, Windgassen pouvait sacrifier deux actes entiers pour en donner un troisième, électrisant. Du moins de Melchior il eut, en s'économisant, la longévité vocale. Sortant à peine de sa spécialité wagnérienne pour un Florestan de Fidelio, un Otello, un Empereur de La Femme sans ombre, un Eisenstein de La Chauve-Souris occasionnels (pour Böhm il sera même une fois un savoureux prince Orlofsky, saisissante silhouette de viveur blasé, à la Oscar Wilde), Windgassen défendit la cause des Heldentenöre jusqu'à 1970, abordant en même temps la direction d'acteurs et siégeant au fauteuil directorial de l'Opéra de Stuttgart, qui fut sa maison mère de bout en bout d'une carrière qui le mena sur toutes les scènes du monde. Acteur placide et massif, mais puissant et suggestif, Windgassen ne fut peut-être qu'un instrument dans les mains d'un régisseur de génie, Wieland Wagner : mais alors ce fut un instrument d'une sensibilité, d'une fidélité, d'une efficacité elles-mêmes géniales.

— André TUBEUF

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, ancien élève de l'École normale supérieure

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Pour citer cet article

André TUBEUF. WINDGASSEN WOLFGANG (1914-1974) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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