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FOSCOLO UGO (1778-1827)

Né d'une mère grecque et d'un père italien, Ugo Foscolo se déclare vénitien de cœur. À Venise, il fréquente les milieux intellectuels, éprouve ses premières émotions sentimentales. De 1796 à 1806, il se bat pour la « liberté » : enthousiasmé par les idées démocratiques, il écrit une Ode à Bonaparte libérateur et milite dans l'armée républicaine ; déçu par le traité de Campoformio qui livre Venise à l'Autriche, il se rend à Milan et à Bologne et il travaille pour des journaux ; il s'enrôle dans la garde nationale de Bologne et accomplit des missions en Toscane. En 1814, Foscolo refuse de prêter serment aux Autrichiens, qui ont repris le pouvoir en Lombardie : il s'enfuit en Suisse puis en Angleterre, où il vit près de sa fille naturelle ; il y mourra. Sa vie revêt un caractère passionné, contrastant avec sa recherche de l'équilibre : ces deux aspects coexistent dans son œuvre littéraire.

Les Ultime Lettere di Jacopo Ortis (1802) composent un roman épistolaire sur le modèle du Werther de Goethe ou de La Nouvelle Héloïse de Rousseau. À la suite d'un amour malheureux, Jacopo se suicide ; mais à ce thème s'en ajoute un autre : Jacopo est un jeune patriote déçu par Campoformio. Passion amoureuse et passion politique se conjuguent pour le malheur de l'individu noble et pur, rejeté par une société corrompue qui le blesse dans ce qu'il aime : toute action devient impossible. « Double » de Foscolo, Ortis est déjà un héros romantique, encore adolescent, passant de la rêverie au désespoir (à ses côtés se dresse l'anti-Ortis, fiancé à la femme qu'il aime, homme positif, maîtrisant ses passions). Aucun détachement vis-à-vis de cette matière brûlante : Jacopo s'analyse en alternant lyrisme et éloquence. C'est le premier roman de la littérature italienne moderne.

En 1803, Foscolo publie des odes et des sonnets. La matière, toujours autobiographique (son aspiration à l'action, sa nostalgie d'une patrie mythique, la mort de son frère, etc.), est travaillée sur le modèle des classiques grecs et latins ; de même, dans les odes, il dépasse le fait divers mondain pour rechercher l'harmonie du monde. En 1806 paraissent Les Tombeaux (I Sepolcri), long poème en hendécasyllabes non rimés, à l'occasion de la publication de l'édit de Saint-Cloud par lequel Napoléon réglementait les sépultures. Partant de thèses d'inspiration sensualiste, Foscolo commence par affirmer la vanité du tombeau d'un point de vue matérialiste. Dans un deuxième temps, il indique la nécessité du tombeau comme illusion, signe de l'affection des vivants pour les morts. Après avoir considéré sa valeur domestique, il insiste sur sa fonction civique : le tombeau éternise le nom des grands qui, par leurs exemples de vertu, incitent à l'action et peut-être à une résurrection de la patrie ; Dante, Parini, Alfieri peuvent jouer un rôle décisif. Les poètes tirent d'ailleurs des tombeaux une source de poésie, abolissant le temps et la mort. Parcourant le temps et l'espace, Foscolo réunit des thèmes contrastants : vie, mort, douleur, gloire... Il transforme la poésie sépulcrale, élaborée par Gray et Young, grâce à son sens de l'histoire inspiré de Vico et à son culte des héros de type alfiérien. D'autre part, c'est sous une forme dense et synthétique que se succèdent les images qui témoignent une nouvelle fois de son aspiration à l'harmonie classique. Harmonie qu'il recherche encore davantage dans son dernier poème, inachevé, Les Grâces (Le Grazie, 1814). Il désire y retracer l'histoire de la civilisation. Dédié au sculpteur Canova, ce chant se compose de trois hymnes à Vénus, Vesta et Pallas, dans lesquels Foscolo tente d'échapper au monde contingent et célèbre des valeurs éternelles : beauté féminine,[...]

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Pour citer cet article

Claude MINOT. FOSCOLO UGO (1778-1827) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • LES TOMBEAUX, Ugo Foscolo - Fiche de lecture

    • Écrit par Claude-Henry du BORD
    • 975 mots

    Digne héritier de Vittorio Alfieri (1749-1803), grand défenseur d'une liberté conquise par l'humanité, et luttant constamment pour échapper à un destin médiocre, Ugo Foscolo (1778-1827) n'est pas que l'auteur du premier roman de la littérature italienne moderne, Les Dernières...

  • ROMANTISME

    • Écrit par Henri PEYRE, Henri ZERNER
    • 22 170 mots
    • 24 médias
    ...dans la traduction française de Shakespeare par Letourneur) et chez Young. Giovanni Fantoni a moins de rhétorique conventionnelle que son modèle Young. Foscolo donnera à ces mêmes motifs leur développement le plus célèbre avec ses Tombeaux (1807). Mais il est plutôt un épigone du mouvement qu'un pionnier...
  • CALVOS ANDRÉ (1792-1867)

    • Écrit par Stratis TSIRKAS
    • 1 483 mots
    ...frustration de l'amour maternel, la nostalgie de son île rongent ses jours. À Florence, où il se rend à l'âge de vingt ans, il rencontre, dans le cercle d' Ugo Foscolo, poète italien né lui aussi à Zante, un climat plus favorable. Élève et secrétaire du poète, il en devient l'ami et le disciple : même goût...

Voir aussi