Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

TRESSES, mathématiques

Représentations linéaires

L'une des techniques les plus importantes pour mieux comprendre les groupes de tresses est l'étude de leurs représentations linéaires, c'est-à-dire l'étude des homomorphismes des groupes Bn vers des groupes de matrices. Cette étude est à l'origine de la plupart des applications en théorie des nœuds et en physique théorique.

Représentation de Burau

Découverte en 1936, cette représentation envoie le groupe Bn dans le groupe des matrices inversibles de taille n dont les coefficients sont des polynômes sur ℤ en une variable t et son inverse. L'image de σi est la matrice

Représentation de Burau - crédits : Encyclopædia Universalis France

Représentation de Burau

, où Ik désigne la matrice-unité de taille k (fig. 24). La représentation de Burau mène au polynôme d'Alexander des nœuds; elle est fidèle (c'est-à-dire injective) pour n = 3, et non fidèle pour n ∗ 5 (résultat de Stephen Bigelow, améliorant un résultat antérieur de John Moody). Le cas n = 4 est ouvert.

Algèbres de Hecke

L'algèbre de Hecke Hn(q) est la ℂ[q, q-1]-algèbre associative engendrée par des générateurs e1, …, en-1 soumis aux relations de tresse complétées par ei2 = (q – 1)ei + q. Elle est de dimension n!, et on représente Bn dans Hn(q) en envoyant σi sur ei.

C'est en construisant une représentation de Bn par l'intermédiaire de Hn(q) et en montrant son invariance par les transformations de Markov que Vaughan Jones a construit en 1984 le polynôme qui porte aujourd'hui son nom, et ouvert ainsi la voie à de nombreux développements sur les invariants des nœuds et des variétés de dimension 3, dus, entre autre, à Vladimir Turaev, Edward Witten, Maxim Kontsevich. Les représentations des groupes de tresses via les algèbres de Hecke sont également liées à l'action des algèbres de Lie sur l'espace de Fock en physique théorique.

Équation de Yang–Baxter et mécanique statistique

Si V est un espace vectoriel et R un opérateur linéaire sur le produit tensoriel V ⊗ V, alors, en notant Ri,i+1 pour Idi-1 ⊗ R ⊗ Idn-i-1, il existe une représentation de Bn dans Vn envoyant σi sur Ri, i+1 si et seulement si R satisfait l'équation de Yang-Baxter R12 ∘ R23 ∘ R12 = R23 ∘ R12 ∘ R23. L'étude des solutions est liée à la théorie des groupes quantiques de Vladimir Drinfel'd, au calcul graphique de Vladimir Turaev et aux catégories tressées d'André Joyal et R. H. Street.

En mécanique statistique, les solutions de l'équation de Yang-Baxter mènent à la résolution de certains modèles à vertex. Les échanges entre mathématiques et mécanique se font dans les deux directions: c'est par le biais de la mécanique statistique que Louis Kauffman a d'abord construit le polynôme «crochet», un autre invariant d'isotopie des nœuds.

Représentation de Lawrence-Krammer

En 2000, Daan Krammer a construit en suivant une approche algébrique une représentation de Bn dans le groupe des matrices inversibles de taille n(n-1)/2 dont les coefficients sont des polynômes en deux variables t, q et leurs inverses, proche d'une représentation définie par Ruth Lawrence, et il a montré sa fidélité pour n = 4. Peu après, Bigelow a étendu le résultat à tout n par un argument géométrique, puis Krammer a généralisé sa propre démonstration. On sait donc désormais réaliser les groupes de tresses comme groupes de matrices.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur à l'université de Caen et à l'Institut universitaire de France

Classification

Pour citer cet article

Patrick DEHORNOY. TRESSES, mathématiques [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Tresse matérielle - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tresse matérielle

Tresse géométrique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tresse géométrique

Produit de tresses - crédits : Encyclopædia Universalis France

Produit de tresses

Autres références

  • NŒUDS (THÉORIE DES)

    • Écrit par Jean BRETTE
    • 1 904 mots
    • 11 médias
    Alexander a également montré que tout nœud peut être obtenu en refermant une tresse brin à brin. Par ailleurs, toujours dans les années 1920, Emil Artin a étudié algébriquement les tresses à n brins, qui forment également un groupe et qui sont engendrées par des croisements élémentaires d'un...

Voir aussi