Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SHEN ZHOU[CHEN TCHEOU](1427-1509)

Un peintre fécond

La carrière picturale de Shen Zhou fut longue et très prolifique (le catalogue approximatif des peintures de Shen Zhou subsistant encore aujourd'hui compte plus de trois cents titres ; il importerait toutefois d'en faire un inventaire critique pour éliminer les faux dont la proportion est considérable, car, de son vivant déjà, Shen Zhou avait la charitable habitude de signer de mauvaises peintures que lui amenaient de pauvres hères, pour qu'ils puissent s'en faire quelque argent). Son œuvre est extraordinairement diverse ; à côté de ses grandes compositions et de ses paraphrases à la fois fidèles et subtilement personnelles des maîtres Yuan, il faut faire une place spéciale aux feuillets d'album où son tempérament original s'est exprimé avec le plus d'abandon. Cependant, même dans le genre libre et elliptique, il ne se départ jamais de sa ferme pondération ; oiseaux, bêtes, fleurs et plantes sont saisis avec une candeur robuste, restituant une fraîcheur et une grandeur nouvelles à un genre qui, entre les mains des académiciens, avait progressivement viré à la décoration exsangue.

Son influence sur la postérité fut énorme. Jusqu'à l'apparition des « quatre Wang » (au début de l'époque Qing), il régna en maître unique et incontesté sur la peinture des lettrés. Chez la plupart de ses disciples, doués d'un tempérament moins généreux, la culture classique tournera facilement à l'éclectisme, engendrant des œuvres intelligentes et exquises, mais souvent dénuées de cette sève franche et de ce souffle qui font la grandeur unique de Shen Zhou. Le sens inné de la mesure, de la clarté, de l'organisation rationnelle, que manifestait l'œuvre du maître, deviendra timidité et terne empire de la règle chez un grand nombre de ses suiveurs. En réaction, une explosion individualiste ouvrira à la création picturale une brèche nouvelle – d'un subjectivisme parfois exhibitionniste et frénétique. Alors disparaîtra la vision sereine et universelle, la conception cosmique du paysage dont Shen Zhou aura été l'un des derniers et plus lucides représentants.

— Pierre RYCKMANS

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : reader, Department of Chinese, Australian National University

Classification

Pour citer cet article

Pierre RYCKMANS. SHEN ZHOU [CHEN TCHEOU] (1427-1509) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Ode à la grenade et au melon en treille, Shen Zhou - crédits : Founders Society Purchase, Mr and Mrs Edgar B Whitcomb Fund,  Bridgeman Images

Ode à la grenade et au melon en treille, Shen Zhou

Autres références

  • CHINOISE CIVILISATION - Les arts

    • Écrit par , , , , , et
    • 54 368 mots
    • 37 médias
    Le courant de la peinture des lettrés est tout entier dominé par la puissante personnalité de Shen Zhou (1427-1509) ; artiste prodigieusement divers et fécond, nourri d'une vaste culture, à la fois littéraire et esthétique, il a puisé son inspiration surtout chez les « quatre grands maîtres Yuan »...
  • WEN ZHENGMING [WEN TCHENG-MING] (1470-1559)

    • Écrit par
    • 1 155 mots

    Figure dominante de la peinture chinoise dans la première moitié du xvie siècle, Wen Zhengming suivit, au moins à ses débuts, les traces de son maître Shen Zhou (1427-1509). Mais il appartenait à une catégorie d'esprit différente et resta plus fidèle aux traditions. Si les connaisseurs chinois classent...