RETENUE À LA SOURCE

Appelée aussi stoppage à la source, la retenue à la source constitue une modalité du recouvrement de l'impôt sur le revenu, en particulier en ce qui concerne les salaires et les revenus des valeurs mobilières. Dans ce système utilisé par tous les pays développés sauf la France, le prélèvement de l'impôt est effectué directement par celui qui verse le revenu (employeur, banque) sur le montant des revenus effectivement versés au bénéficiaire. Les retenues ainsi opérées sont versées au fisc, elles sont définitives sous réserve des ajustements nécessaires en fin d'année. Diverses méthodes ont été utilisées pour tenir compte de la progressivité des barèmes de l'impôt sur le revenu : la plus célèbre est la technique britannique du P.A.Y.E. (Pay as you earn). Cette méthode se caractérise par un système cumulatif qui permet d'ajuster, mois par mois et semaine par semaine, les retenues d'impôt en fonction des revenus encaissés et des impôts payés jusqu'au mois ou à la semaine considérés. On évalue chaque année le montant des réductions d'impôt dont peut bénéficier un contribuable en fonction de sa situation personnelle (charges de famille, âge, revenus, etc.). Le douzième ou le cinquante-deuxième de ce montant est alors déduit des salaires mensuels ou hebdomadaires versés au contribuable, puis on calcule le revenu imposable et l'impôt dû en tenant compte des revenus et des impôts déjà payés au cours des mois ou semaines précédents. Grâce à ce système de régularisation en cours de période d'imposition, le P.A.Y.E. permet de faire coïncider avec une assez grande exactitude les retenues effectuées et la dette réelle d'impôt, et il rend pratiquement inutiles les ajustements en fin d'année. Les systèmes américain ou allemand sont un peu moins sophistiqués mais sont fondés sur les mêmes principes.

La retenue à la source présente de nombreux avantages. En premier lieu, elle permet une régularisation des rentrées fiscales en étalant la perception des recettes tout au long de l'année. Elle simplifie également le travail de l'administration fiscale qui se décharge de ses tâches d'assiette et de recouvrement sur un nombre relativement réduit de collecteurs d'impôt, en particulier les employeurs. Enfin, du point de vue du contribuable, l'impôt perçu à la source est mieux supporté puisque le prélèvement est fractionné et étalé dans le temps. Tout cela explique le succès de ce système commode de recouvrement de l'impôt. Cependant, on doit remarquer que la mise en application de cette technique se heurte à des obstacles techniques et psychologiques. En effet, elle ne peut être utilisée efficacement que dans un pays où la majeure partie de la population active est salariée et dans lequel les entreprises peuvent supporter les sujétions qu'impose la retenue à la source. Par ailleurs, certains relèvent que l'effet d'« anesthésie fiscale » produit par la retenue à la source peut conduire à une surimposition des revenus salariaux dans les pays où les salariés sont mal organisés pour défendre leurs intérêts. Du côté des employeurs, on fait valoir que l'introduction du stoppage à la source entraînerait un accroissement considérable des charges salariales, car les employés auraient tendance à ressentir ce prélèvement comme une réduction de leur rémunération. Ces différentes raisons expliquent qu'à l'heure actuelle les syndicats et le patronat français restent plutôt hostiles à la mise en application de cette technique de recouvrement. Mais on relèvera que ces obstacles semblent être surtout d'ordre psychologique.

— Jean-Claude MAITROT