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QUODLIBÉTALES QUESTIONS

La disputatio de quolibet (débat en règle sur tout sujet) est la forme la plus solennelle que revêt la disputatio dans l'Université médiévale. Les maîtres régents en exercice annoncent, rarement chaque année, souvent tous les deux ou trois ans, qu'ils répondront à toute question à eux posée par l'assistance réunie à cet effet : étudiants dont la présence est obligatoire, clercs de tout ordre et de toute nation, autres maîtres qui peuvent aussi intervenir. Cette séance solennelle illustre le rôle dominant de la disputatio dans la pédagogie universitaire, liée au rôle de la dialectique dans la scolastique : elle utilise la forme du syllogisme, qui moule obligatoirement le raisonnement ; elle oblige à une présentation de la réponse sous la forme d'un exposé des arguments pour et contre, de la solution avancée, de la réponse aux objections : c'est la méthode des sommes. Un opposant (opponens), maître, étudiant ou spectateur, présente ses objections à la réponse du maître, et un bachelier défendeur (respondens) soutient la thèse magistrale. Les maîtres y font valoir leur science, leur technique et leur présence d'esprit face aux questions insidieuses ou brûlantes ; ils précisent ou nuancent les opinions de leurs traités ou de leurs cours. Une seconde séance permet de mettre en ordre la dispute et d'en rédiger le compte rendu qui nous fait mesurer l'écho de l'actualité dans le cadre universitaire : questions quodlibétales sur les pouvoirs dans la paroisse au temps de la querelle entre mendiants et séculiers, sur les procès des Templiers au xive siècle. Nous connaissons parfois ainsi la position d'un maître sur une question importante qu'il n'a jamais traitée de manière explicite dans une autre occasion. Surtout, on découvre une spontanéité révélatrice des sensibilités profondes des individus et de l'institution. La pratique du quodlibet existe aussi dans les facultés des arts, de médecine et de droit, ainsi que dans les studia des ordres religieux. Le genre est illustré par les plus grands noms de la scolastique ; Henri de Gand, Thomas d'Aquin, Jacques de Viterbe, Gilles de Rome, Guillaume d'Ockham, Alexandre de Halès, Durand de Saint-Pourçain.

— Jean-Pierre BORDIER

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Pour citer cet article

Jean-Pierre BORDIER. QUODLIBÉTALES QUESTIONS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MOYEN ÂGE - La pensée médiévale

    • Écrit par Alain de LIBERA
    • 22 212 mots
    ...celle où le fonctionnement même du rituel académique, avec sa hiérarchie d'épreuves qualifiantes (les disputationes ordinaires) ou glorifiantes (les questions « quodlibétiques »), ses contraintes, mais aussi ses marges, engendre de nouveaux modes de pensée, détachés de toute lettre, lancés...
  • THOMAS D'AQUIN saint (1224 ou 1225-1274)

    • Écrit par Marie-Dominique CHENU
    • 4 377 mots
    • 1 média
    ..., qui est l'acte universitaire par excellence, dans le haut enseignement : les questions disputées sont la grande œuvre de Thomas d'Aquin. Enfin, dans des séances solennelles, se tenaient deux fois par an des disputes d'un genre particulier, où l'initiative de la discussion ne venait pas d'un...

Voir aussi