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MOUTONS-NOIRS ou KARA KOYUNLU

L'origine du nom de cette fédération de tribus turkmènes est incertaine : peut-être s'agit-il d'un totem, peut-être de la couleur des animaux réellement élevés. C'est Bayram, chef du clan des Bahārlū, qui, vers 1370, réunit différentes tribus turkmènes, tout en se dégageant de l'égide de ses protecteurs, les sultans djalāyirides. Il accroît le territoire et la puissance de la fédération naissante par la prise de plusieurs villes, dont Mossoul.

À sa mort en 1380, son fils Muḥammad Qara Yūsūf s'installe à Tabrīz et se déclare indépendant. Il s'allie à Bayazīd Ier (Bajazet) contre Tīmūr Lang (Tamerlan) et y gagne la partie occidentale de l'‘Irāq. Chassé de Baghdād, où il s'était réfugié, à cause de l'avance de Tamerlan, il trouve d'abord asile en Égypte auprès des mamlūk, mais finit par être incarcéré.

En 1406, après la mort de Tamerlan, il regagne Tabrīz et engage la lutte contre les Aq Qoyūnlu (Moutons-Blancs), fédération rivale, pour s'emparer du Diyār Bakr. La paix revenue entre les deux fédérations, Qara Yūsūf étend encore ses possessions iraqiennes en prenant plusieurs villes clefs, dont Qazwīn en 1419. Il meurt cette même année, alors qu'il marchait en combat contre Shāh Rokh, fils et successeur de Tamerlan.

Amīr Iskander, son fils, regroupe les tribus fédérées, mais il est défait une première fois par Shāh Rokh en 1421. Insatiable, il laisse s'éloigner le Tīmūride, puis s'empare de l'Azerbaīdjan (1424). C'est la deuxième rencontre avec Shāh Rokh et la deuxième défaite (1429). Iskander s'enfuit, et Shāh Rokh nomme son propre frère, Abū Sa‘īd, à la tête des Qara Qoyūnlu. Mais, dès que l'énorme armée du Tīmūride s'est éloignée, Iskander revient à la charge et livre la région à de telles exactions que Shāh Rokh envoie une nouvelle armée commandée par Djahān shāh, frère d'Iskander (1434). Défait une troisième fois, mais non battu, Iskander veut attaquer à nouveau ; repoussé il s'enferme dans son bastion d'Alandjaq, où son propre fils le tue (1437).

Djahān shāh, son frère et successeur, apparaît, lui, comme un sage administrateur : il réorganise l'Azerbaīdjan et tente de faire renaître ses possessions des décombres de la guerre. Politicien habile, il réussit à annexer Iṣfahān, le Fārs et le Khurāsān (1458) : il transporte sa capitale à Hārāt. Mais ses ambitions sont démesurées et le Tīmūrīde ne peut accepter d'abandonner le Khurāsān : une armée est levée et marche contre Djahān shāh pour reprendre la province. Pris en tenaille entre cette armée qui s'avance et la rébellion de deux de ses fils, l'un en Azerbaīdjan et l'autre à Baghdād (1465), il cède devant le Tīmūride et rend le Khurāsān. Ses deux fils, à cause du danger d'éclatement qu'ils représentaient, sont éliminés ; Djahān shāh peut régner sans conteste de l'Azerbaīdjan à Baghdād. Il est tué en 1467 par Ūzūn Ḥasan des Aq Qoyūnlu, celui qui, en 1468, tuera aussi le dernier représentant des Qara Qoyūnlu, Ḥasan ‘Alī.

— Philippe OUANNÈS

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Pour citer cet article

Philippe OUANNÈS. MOUTONS-NOIRS ou KARA KOYUNLU [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MOUTONS-BLANCS ou AK KOYUNLU

    • Écrit par Philippe OUANNÈS
    • 448 mots

    Fédération de tribus turkmènes dont le nom se réfère soit à un totem commun, éponyme, soit au fait que les membres de ces tribus élevaient des moutons blancs. L'un des clans de ces tribus, les Bayundur, donna naissance à des chefs qui prirent le pouvoir et l'initiative d'organiser cette fédération....

  • PERSE - Histoire

    • Écrit par Jean CALMARD, Philippe GIGNOUX
    • 8 046 mots
    • 8 médias
    ...Mongols avaient repoussés à l'ouest vinrent par un choc en retour balayer l'Azerbaïdjan et l'Iran occidental en trois vagues successives : les Moutons-Noirs (proshī‘ites), évincés en 1468 par les Moutons-Blancs (d'obédience sunnite), éliminés par les Qïzïlbash (les « têtes rouges », porteurs...

Voir aussi