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MALIBRAN MARIA FELICIA (1808-1836)

Maria Felicia García (épouse Malibran) est née le 24 mars 1808 à Paris, fille aînée du célèbre ténor espagnol Manuel García, le premier Almaviva du Barbier de Séville de Rossini. Elle débuta sur scène à l'âge de six ans, dans Agnese de Ferdinando Paër, puis étudia le chant avec son père, qui lui imposa un entraînement impitoyable. Terrorisée, elle atteint à la perfection. À l'âge de dix-sept ans, le 7 juin 1825, elle fait ses vrais débuts, à Londres, dans Le Barbier de Séville. Le 1er octobre de la même année, toute la famille García s'embarque pour New York, où le 29 novembre Maria fera entendre au Park Theatre le même rôle de Rosine.

Le répertoire de la troupe en tournée comprend quatre autres opéras de Rossini (Tancrède, Le Turc en Italie, Otello, Cenerentola), deux œuvres de García lui-même et, enfin, Don Giovanni de Mozart, où Maria chante Zerline devant Lorenzo Da Ponte, le librettiste du chef-d'œuvre.

Durant cette tournée, Maria fait connaissance d'un négociant français du nom d'Eugène Malibran et l'épouse sur un coup de tête, dans le but unique d'échapper à son père. Le mariage est, évidemment, un échec, mais Maria arrive à se libérer de l'emprise familiale, refuse de suivre les autres au Mexique (où ils se feront dépouiller par des bandits !) et retourne seule en Europe, à la fin de 1827.

Le 8 avril 1828 elle débute à Paris dans Sémiramis de Rossini. Elle voyage ensuite entre Paris et Londres avec Tancrède, Sémiramis, Desdemona d'Otello, Amina de La Somnambule de Bellini. Elle partage ce répertoire dans les deux villes avec une autre « légende », Giuditta Pasta, de dix ans son aînée.

En 1832, Malibran affronte les scènes italiennes : elle débute à Bologne dans Les Montaigus et les Capulets de Bellini, chante La Somnambule à Naples, où elle aborde également, en février 1834, sa première Norma. Ce sera aussi le rôle de ses débuts à la Scala de Milan, le 15 mai. Le 12 juin 1835 elle est à nouveau à Londres, où elle chante au Covent Garden la version anglaise du Fidelio de Beethoven. En décembre, elle est de retour à la Scala, dans Maria Stuarda de Donizetti. Son mariage avec Malibran annulé, elle épouse le violoniste Charles Bériot, depuis six ans son amant.

Au cours de l'été de 1836, enceinte, elle tombe de cheval et meurt peu après, le 23 septembre, à l'âge de vingt-huit ans. Bouleversé par la nouvelle, Alfred de Musset écrira ses Stances.

La voix de Malibran, selon les critères actuels, fut celle d'un mezzo-soprano, mais l'étendue de la tessiture ainsi que l'incomparable virtuosité — sans laquelle, à l'époque, l'art du chant fut inconcevable — la feraient classer plutôt parmi les « coloratures dramatiques ». Sa voix fut — selon les témoignages — étonnante de puissance et de flexibilité, ce que sa capacité de chanter autant Rosine que Norma démontre assez. Cet art vocal, acquis à grand-peine sous le fouet du professeur sévère que fut son père, n'aurait pas suffi toutefois à créer sa légende. On admira surtout ses accomplissements de comédienne, capricieuse, imprévisible et géniale. Le critique Ernest Legouvé voyait en elle la fille de Shakespeare, Hugo, Lamartine et Musset (elle était pour lui « spontanéité, inspiration et fermentation »), contrairement à la Pasta, associée à Sophocle, Corneille et Racine. Chanteuse romantique contre chanteuse classique : et le parti anti-Malibran fut puissant. Delacroix l'accusait de recourir à des procédés indignes d'une artiste, mais Chopin, Mendelssohn, Liszt et Rossini furent d'un avis contraire. Elle-même, traumatisée par les tortures paternelles, considérait sa propre voix comme un ennemi à soumettre.

Un météore, une apparition : tout, ses excès, et même sa mort prématurée, contribua à sa légende qui n'a pas d'égale dans l'histoire[...]

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Piotr KAMINSKI. MALIBRAN MARIA FELICIA (1808-1836) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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