Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

DALIO MARCEL (1899-1983)

Dans le cinéma français des années 1930, les acteurs de composition connaissaient une période faste : délivrant les répliques les plus surprenantes, ils étaient un peu les héritiers des caricaturistes. En revanche, leurs emplois étaient strictement délimités par leur physique ; ils ne pouvaient accéder aux grands « premiers rôles » réservés aux acteurs satisfaisant aux canons de la « beauté classique » qui dominaient à l'époque. Après avoir débuté au théâtre, notamment dans Les Temps difficiles, Israël Blauschild, dit Marcel Dalio, trouve vite sa place dans ce cinéma qui faisait un sort aux répliques. Élégant et beau parleur, veule et libertin, il évolue avec aisance dans des comédies sophistiquées ou adaptées de succès théâtraux. C'est pourtant sous les traits d'un mouchard qu'il s'impose au public : Julien Duvivier accentue dans Pépé le Moko (1937) la noirceur de son personnage, amorcée déjà dans Cargaison blanche. Il tourne alors sans discontinuer et sans aller jusqu'au bout de ses possibilités, qui auraient pu faire de lui un Peter Lorre français. Il rencontre en Renoir un merveilleux directeur d'acteurs : La Grande Illusion (1937) et La Règle du jeu (1939) demeurent dans l'imaginaire du spectateur. Dans ce dernier film, Dalio a l'occasion d'exprimer son goût du plaisir et de traduire les sentiments d'une caste qui s'effondrait. Il tient également un rôle important dans La Maison du Maltais de Pierre Chenal (1938), au côté de Viviane Romance. Pendant la guerre, il doit s'exiler aux États-Unis et ne reverra jamais son père ni sa mère, déportés en camp de concentration. L'importance des rôles diminue, mais le passage à un autre système de production n'altère pas son art de faire revivre la moindre silhouette, si modeste soit-elle. Il tourne avec les plus grands metteurs en scène – Josef von Sternberg (il est très remarqué dans le rôle du croupier de Shangai Gesture, 1941), Henry King (Le Chant de Bernadette, 1943), Michael Curtiz (Casablanca, 1942), Howard Hawks (Le Port de l'angoisse, 1943) et Edmund Goulding (Tessa, la nymphe au cœur fidèle, 1944). Aucun de ces metteurs en scène ne le cantonne dans des rôles de Français type. Dalio se glisse aisément dans l'univers d'acteurs qu'il avait admirés comme spectateur. À la Libération, il rentre en France et tourne de nouveau pour des metteurs en scène tels que René Clément (Les Maudits, 1946, Dédée d'Anvers, 1947, où il retrouve un rôle de souteneur au côté de Simone Signoret). Mais le système de production a changé et il y a moins de place pour des acteurs excentriques. Dès lors, il se partage entre la France et les États-Unis dans des compositions plus stéréotypées.

Pourtant, doué d'une grande faculté d'adaptation, il va s'insérer dans l'univers de jeunes cinéastes, tel Philippe de Broca (Un monsieur de compagnie, 1964). Il participe à la vogue des « jeunes auteurs » des années 1970 : Joël Santoni (Les Yeux fermés, 1973), René Feret (La Communion solennelle, 1977), Paul Barge (Le Paradis des riches, 1978).

— André-Charles COHEN

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

André-Charles COHEN. DALIO MARCEL (1899-1983) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Voir aussi