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PINCHERLE MARC (1888-1974)

« Il fit très bien son métier de critique qui consiste à exciter à penser. » Ce mot de Faguet sur Brunetière, Marc Pincherle rêvait de le mériter. Qui, hésiterait à lui décerner cette posthume consolation ?

Il reste pour le plus grand nombre l'apôtre de Vivaldi mais aussi le chroniqueur fidèle et acharné, attaché durant trente ans aux Nouvelles littéraires.

Le petit homme droit et vif que l'on voyait partout où la musique se faisait, à l'œil malicieux, au crayon habile (ses croquis étaient appréciés), à la drôlerie caustique, à l'intégrité infaillible avait partagé sa vie entre deux métiers : la musicologie et la critique. Il disait du premier qu'il était plus facile que le second. Le musicologue choisit son domaine, il en trace les limites ; le critique, qui juge les autres, au contraire doit « tout savoir sur la musique, disait-il, sur l'acoustique, les lois physiques et physiologiques, sur les civilisations, les formes, les hommes » et, ayant acquis cette science universelle, il ne doit pas oublier qu'il est le lien entre le monde de la musique et ses contemporains. Pincherle disait volontiers que la critique repose sur la confiance qu'il inspire à ses lecteurs. « L'attrait majeur de notre profession, a-t-il écrit, c'est le sentiment que nous avons parfois de créer dans notre public une harmonie de goûts, une „sympathie“ au sens étymologique du mot, grâce à quoi nos opinions trouvent en lui une résonance... Porter ainsi quelque clarté sur des zones d'ombre, essayer de mieux situer une œuvre, aider un créateur ou un interprète trop modeste à revendiquer sa place au soleil, ramener à leur juste proportion des succès de snobisme, autant de tâches dont l'utilité me semble évidente et qui entrent dans les attributions de la critique quotidienne. »

Marc Pincherle naît en Algérie, à Constantine, le 13 juin 1888. À un père officier de carrière, bon musicien amateur, il doit sans doute son penchant pour la musique ; mais il avoue avoir embrassé la carrière de musicologue et de critique (cette dernière un peu par hasard) pour n'avoir pas pu faire lui-même de la musique. Après des études au Prytanée militaire de La Flèche, au lycée de Rennes, au lycée Henri-IV à Paris, il reçoit à la Sorbonne l'enseignement de Romain Rolland et d'André Pirro. Ayant acquis une solide technique de violon et fréquenté très jeune encore Fritz Kreisler, Jacques Thibaud et Georges Enesco, pour qui il ressent un véritable coup de foudre, il reste fidèle durant toute sa vie de musicologue à son instrument favori et à la famille des cordes. Il fréquente le mécène et grand musicologue Jules Écorcheville et, sur son conseil, il présente en 1911 une thèse intitulée La Technique du violon chez les premiers sonatistes français ; mais la Première Guerre mondiale anéantit le premier travail entrepris sur Vivaldi. Trois fois blessé, il remet sur le chantier, dès la guerre finie, le travail qui sera celui de toute une vie et qui lui assurera une renommée mondiale. Son monumental ouvrage Antonio Vivaldi et la musique instrumentale ne verra le jour qu'en 1948 et contribuera au retour en faveur, combien populaire, de ce grand musicien.

Très tôt Marc Pincherle fait preuve d'une grande activité et connaît une estime qui le place dans la lignée des grands musicologues à la suite de Romain Rolland, Jules Écorcheville, André Pirro, Henri Expert, Henri Prunières, Louis Laloy. Admis en 1918 membre de la Société française de musicologie, il en sera successivement secrétaire général, vice-président, président, puis de 1956 à sa mort le 20 juin 1974, à Paris, président honoraire.

Il a été également rédacteur en chef du Monde musical (1925-1927), de la revue Musique (1927-1930), directeur artistique de la société Pleyel (1927-1955), secrétaire général du festival d'Aix-en-Provence[...]

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Écrit par

  • : écrivain et musicologue, secrétaire général adjoint de l'Académie Charles-Cros

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Pour citer cet article

Guy ERISMANN. PINCHERLE MARC (1888-1974) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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