Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

MAGICIENS DE LA TERRE

Inaugurée à Paris en 1989 (du 18 mai au 14 août) au Centre Georges-Pompidou et à la Grande Halle de La Villette, l’exposition Magiciens de la Terre, avec pour commissaire Jean-Hubert Martin, a fait l’objet pour son vingt-cinquième anniversaire en 2014 de plusieurs manifestations. Mentionnons un colloque international (27-28 mars), une université d’été (1er-10 juillet), une exposition documentaire (Magiciens de la Terre. Retour sur une exposition légendaire au Centre Georges-Pompidou à Paris, du 2 juillet au 8 septembre) ainsi que quelques publications.

Une exposition pionnière

Cet engouement rétrospectif peut certainement être rapporté à une politique institutionnelle du Centre Georges-Pompidou faisant retour sur sa propre histoire. Il témoigne aussi du goût croissant des historiens et des théoriciens de l’art pour l’exposition comme forme spécifique de création. Mais l’intérêt que suscite encore aujourd’hui Magiciens de la Terre tient avant tout aux évolutions historiques du monde de l’art contemporain où elle apparaît depuis plusieurs années comme l’une des manifestations ayant inauguré un mouvement de désoccidentalisation relative du canon esthétique, lié à ce que certains appellent l’âge global de l’art. Avec quelques autres pionniers, Jean-Hubert Martin aurait ainsi fait plus que « décentrer » le regard sur les arts visuels. Il aurait anticipé un changement de paradigme de l’art contemporain où la géographie se substitue à l’histoire en tant qu’arbitre de la création. L’exposition partait en effet d’un constat désenchanté à l’égard des promesses de l’histoire et du credo moderniste. Elle entendait le remplacer par une exploration des confins culturels et géographiques de l’art et de la diversité de ses formes contemporaines.

Se qualifiant d’emblée de « première exposition mondiale d'art contemporain », Magiciens de la Terre avait en effet présenté cent artistes issus de tous les continents, à une époque où dominait presque exclusivement une conception de la création plastique limitée à l’espace atlantique nord. Quatre grandes familles de critères avaient en principe présidé à la sélection des créations non occidentales : l’ouverture à l’altérité culturelle ; l’autonomie de la pratique artistique par rapport à la tradition ou à la commande ; le lien de cette pratique avec l’expérience vécue et la réflexion de l’artiste ; l’appartenance de celui-ci à une minorité ou à un groupe dominé. À l’horizon de ce geste apparaît l’image d’un art sans frontières géographiques et sans barrières culturelles, où les créations non occidentales sont placées sur un pied d’égalité avec les créations occidentales. Des œuvres d’artistes tels que Sigmar Polke, Anselm Kiefer ou Louise Bourgeois voisinaient ainsi avec celles de Frédéric Bruly Bouabré, Chéri Samba, Temba Rabden, Gu Dexing, Jangarh Singh Shyam, Nera Jambruk, Erik Boulatov ou Ronaldo Pereira Rego.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Laurent JEANPIERRE. MAGICIENS DE LA TERRE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ART CONTEMPORAIN

    • Écrit par Yves MICHAUD, Raymonde MOULIN
    • 12 432 mots
    • 4 médias
    Le nouveau contexte culturel est marqué, en cette même année, par un événement fondateur, l'exposition Magiciens de la terre organisée par Jean-Hubert Martin à Paris au Centre Georges-Pompidou. L'idéologie artistique associée à la notion de dépassement continu comme loi de l'histoire a été mise...
  • CHINOISE CIVILISATION - Les arts

    • Écrit par Corinne DEBAINE-FRANCFORT, Daisy LION-GOLDSCHMIDT, Michel NURIDSANY, Madeleine PAUL-DAVID, Michèle PIRAZZOLI-t'SERSTEVENS, Pierre RYCKMANS, Alain THOTE
    • 54 368 mots
    • 37 médias
    ...extension à Taipei). Au Centre Georges-Pompidou à Paris, Jean-Hubert Martin ouvre l'art contemporain aux artistes non occidentaux lors de l'exposition Les Magiciens de la terre. Pour la première fois des artistes chinois (et même un tibétain : Temba Rabden) vont exposer leurs œuvres dans une grande manifestation...
  • AVANT-GARDE

    • Écrit par Marie-Laure BERNADAC, Nicole BRENEZ, Antoine GARRIGUES, Jacinto LAGEIRA, Olivier NEVEUX
    • 10 106 mots
    • 11 médias
    ...découvreurs » de l'art africain contemporain – du catalogue des Magiciens de la Terre. On fait en effet généralement coïncider ce tournant décisif avec l'exposition pionnière des Magiciens de la Terre, organisée en 1989 par Jean-Hubert Martin au Centre Georges-Pompidou et à la Grande Halle de la...
  • JAPON (Arts et culture) - Les arts

    • Écrit par François BERTHIER, François CHASLIN, Universalis, Nicolas FIÉVÉ, Anne GOSSOT, Chantal KOZYREFF, Hervé LE GOFF, Françoise LEVAILLANT, Daisy LION-GOLDSCHMIDT, Shiori NAKAMA, Madeleine PAUL-DAVID
    • 56 170 mots
    • 35 médias
    ...la peinture abstraite, avec Nakamura Kazumi (né en 1956), et figurative, chez Yokoo Tadanori (né en 1936), graphiste « converti » à la peinture. À l'heure de l'exposition Les Magiciens de la terre (1989, Centre Georges-Pompidou, Paris), le Japon dénonce à son tour l'occidentalo-centrisme...

Voir aussi