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LES PRÉCIEUSES RIDICULES, Molière Fiche de lecture

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<em>Les Précieuses ridicules</em> de Molière, mise en scène de Stéphane Varupenne et Sébastien Pouderoux - crédits : Raphael Gaillarde/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Les Précieuses ridicules de Molière, mise en scène de Stéphane Varupenne et Sébastien Pouderoux

Les Précieuses ridicules est une comédie en un acte et en prose de Molière (1622-1673), créée le 18 novembre 1659 au Théâtre du Petit-Bourbon à Paris. La pièce, qui comprend dix-sept scènes, constitue le premier grand succès parisien de la troupe. Depuis leur retour dans la capitale en 1658, sous la protection de Monsieur, frère du roi Louis XIV, Madeleine Béjart, Molière et leurs compagnons n’avaient en effet connu que des résultats mitigés, au point de risquer une nouvelle faillite. Si la première des Précieuses ridicules suscite une curiosité certaine du public, avec une recette de 533 livres, la deuxième entérine le triomphe (1 400 livres) : « ceux qui […] n’avaient pas vu représenter les Précieuses […] n’osaient l’avouer sans rougir », écrit quelques semaines plus tard Jean Donneau de Visé (1638-1710), futur collaborateur de Molière.

La pièce met en scène Cathos et Magdelon, deux jeunes provinciales avides de romans au point d’en adopter les codes, les noms et les expressions. Au désespoir de Gorgibus (père de Magdelon et oncle de Cathos), elles vont jusqu’à repousser leurs prétendants parce qu’ils ne se comportent pas comme les héros de leurs lectures. Ceux-ci, La Grange et Du Croisy, se vengent alors en envoyant leurs valets – Mascarille (incarné par Molière) et Jodelet – qui se prennent pour des marquis du grand monde. Tout l’objet de la comédie réside dans les conversations qui s’ensuivent : de scène en scène, les deux jeunes filles et les deux « marquis » passent en revue les dernières modes, les nouveautés poétiques ou encore l’actualité musicale, parodiant ainsi la culture et les comportements contemporains pour le plus grand bonheur du public. À la fin de la pièce, les deux amants démasquent leurs valets et les chassent à coups de bâtons, humiliant les deux femmes.

La recette du succès

La réussite extraordinaire des Précieuses ridicules tient à la « recette Molière », une combinaison de trois ingrédients que le comédien-auteur inaugure avec cette pièce et qui se retrouve ensuite à divers degrés dans toutes ses comédies.

Les Précieuses ridicules mise tout d’abord sur la connivence avec le public, en multipliant les références au monde des spectateurs. Lorsque la servante Marotte parle du « Grand Cyre » (scène 6) ou que Magdelon rêve de billets galants et d’évanouissements amoureux, elles font explicitement allusion à deux « best-sellers », Artamène ou le Grand Cyrus(1649) et Clélie, histoire romaine (1650) de Madeleine de Scudéry. Le costume outrancier de Mascarille est ridicule, mais chacun des éléments qui le composent correspond aux modes contemporaines. De même, son quatrain impromptu (« Au voleur ! Au voleur ! Au voleur ! Au voleur ! », scène 9) évoque, sur le mode parodique, les pratiques et la production poétiques du temps.

La troupe de Molière recourt ensuite à des jeux de scène uniques dans le théâtre français. À la différence des troupes concurrentes, dont l’interprétation est avant tout centrée sur le texte, celle du Petit-Bourbon mise sur le corps autant que sur la parole. Molière s’inspire de la commedia dell'arte, une tradition italienne professionnelle du théâtre qui, entre autres caractéristiques, multiplie les acrobaties, postures comiques et expressions faciales. L’entrée de Mascarille (« le petit masque », en italien) en chaise à porteurs et les coups de bâtons qu’il reçoit (scène 7) en sont l’exemple. Seuls les comédiens italiens, avec qui Molière et sa troupe partageaient la salle du Petit-Bourbon, offraient alors de tels spectacles.

Enfin, le dramaturge propose des titres qui retiennent l’attention. En 1659, le terme « précieuses » est en effet d’une actualité brûlante.

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Christophe SCHUWEY. LES PRÉCIEUSES RIDICULES, Molière - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 23/05/2023

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<em>Les Précieuses ridicules</em> de Molière, mise en scène de Stéphane Varupenne et Sébastien Pouderoux - crédits : Raphael Gaillarde/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Les Précieuses ridicules de Molière, mise en scène de Stéphane Varupenne et Sébastien Pouderoux

Autres références

  • MOLIÈRE (1622-1673)

    • Écrit par
    • 7 631 mots
    • 7 médias
    ...quatorze années de cette seconde carrière parisienne. La première d’entre elles consiste dans le succès à la fois inattendu et phénoménal que connaît Les Précieuses ridicules, petite comédie de complément de programme, composée par Molière à l’automne 1659, une année après l’établissement de la troupe...
  • PRÉCIOSITÉ

    • Écrit par
    • 2 968 mots
    ...restent le roman à clef, encore mal éclairci, de l'abbé de Pure, La Prétieuse, ou le Mystère des ruelles, qui a paru en quatre volumes de 1656 à 1658, les Précieuses ridicules de Molière, représentées pour la première fois à l'hôtel de Bourgogne le 18 novembre 1659, et les œuvres de Baudeau de Somaize,...