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JIMÉNEZ JUAN RAMÓN (1881-1958)

Le romantisme idéaliste

J. R. Jiménez distinguait lui-même trois époques dans son œuvre lyrique : une première étape « romantique idéaliste » ; une deuxième d'un « spiritualisme symboliste » ; une troisième « métaphysique, d'exaltation de l'intelligence, savante, de type goethéen ». La première période est celle d'une inspiration souvent douloureuse, intimiste, raffinée. Ninfeas et Almas de violeta (Âmes de violette), publiés la même année (1900), doivent leur titre, respectivement, à Valle-Inclán et à Rubén Darío ; c'est assez dire leur filiation. Les images éclatantes, l'emphase du vocabulaire, la musique des mots et des rythmes, la rhétorique parfois pompeuse, jusqu'à la couleur de l'encre d'imprimerie, verte ou violette, tout est d'un modernisme presque insolent. Dès les recueils suivants, Rimas (1902) et Arias tristes (1903), le ton a changé, les accents sont plus vrais, plus dépouillés. Jardines lejanos (1904, Jardins lointains), dans des tonalités de rêve, de nuit, de clair de lune, cherche à traduire, par la mélodie douce et sensuelle des mots, la mélodie de quelques pages de Glück, de Schumann, de Mendelssohn. La production de ces années est abondante ; elle fut en partie recueillie dans la Segunda Antolojía poética en 1922. L'art du poète s'enrichit de sensations nouvelles (Baladas de primavera, 1910, Ballades de printemps), d'émotions complexes et presque morbides (Poemas mágicos y dolientes, 1911, Poèmes magiques et douloureux), de recherches métriques de plus en plus poussées (La Soledad sonora, 1911). Pastorales (1911) témoigne d'une grande maîtrise dans l'évocation stylisée de paysages, de scènes champêtres à la façon de Francis Jammes, sur des rythmes empruntés souvent à la copla andalouse, où se marient avec bonheur l'allégresse et la mélancolie. Mais la maîtrise et la virtuosité de Jiménez éclatent avec magnificence dans le livre qui clôt cette première étape : Sonetos espirituales (1917) ; les émotions, les sentiments, surtout l'amour ou l'amitié, s'y trouvent métamorphosés en symboles avec un art prodigieux de l'expression juste et suggestive. Tout un monde intérieur d'une richesse inépuisable se manifeste ici dans une forme poétique d'une rigueur sans faille.

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

Classification

Pour citer cet article

Bernard SESÉ. JIMÉNEZ JUAN RAMÓN (1881-1958) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Juan Ramón Jiménez - crédits : Bettmann/  Getty Images

Juan Ramón Jiménez

Autres références

  • ESPAGNE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par Jean CASSOU, Corinne CRISTINI, Jean-Pierre RESSOT
    • 13 749 mots
    • 4 médias
    Dans ce riche complexe, la poésie espagnole a puisé une vie nouvelle. Une grande liberté lui est désormais offerte, qui se sent chez les poètes de 1898, puis dans l'effusive multiplicité d'images, l'environnement cosmique de Juan Ramón Jiménez (1881-1958).
  • SONNETS SPIRITUELS, Juan Ramón Jiménez - Fiche de lecture

    • Écrit par Bernard SESÉ
    • 699 mots

    Juan Ramón Jiménez (1881-1958) distinguait trois périodes dans sa vie d'écrivain : l'époque sensitive, de 1909 jusqu'à 1915 environ ; l'époque intellectuelle, inaugurée par le Journal d'un poète nouveau marié (1916) – « début du symbolisme moderne dans la poésie...

Voir aussi