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WIDEMAN JOHN EDGAR (1941- )

Né le 14 juin 1941 à Washington, D.C., John Edgar Wideman a passé son enfance à Pittsburgh, dans la communauté noire d'Homewood, dont l'une de ses aïeules, Sybela Owens, une esclave en fuite, fut une des fondatrices. Élève brillant et athlète accompli, il se distingue sans tarder comme capitaine de l'équipe de basket-ball de son école et collectionne distinctions et bourses. En 1963, la prestigieuse bourse Rhodes lui permet d'étudier pendant trois ans la littérature anglaise à Oxford. À son retour en Amérique, il rejoint le Writers' Workshop de l'Iowa où il achève A Glanceaway, son premier roman.

Joyce et T. S. Eliot sont alors ses grands modèles d'écriture. A Glanceaway (1961) entrelace les monologues intérieurs d'un ex-drogué noir et d'un professeur de littérature blanc et homosexuel. De même, Hurry Home (1969) mêle les destinées d'un Noir, l'étudiant Cecil Otis Braithwaite, et d'un Blanc, l'écrivain Charles Webb, l'un en quête d'une figure paternelle, l'autre d'un fils perdu. Après une longue odyssée en Europe, Braithwaite, plutôt que de vivre dans la contradiction entre ses racines africaines et la culture blanche, choisit de retourner à l'anonymat du ghetto.

Dans la mesure où cultures noire et blanche y dialoguaient encore, les deux premiers romans de Wideman étaient à contre-courant du « black arts movement » des années 1960. Il est également révélateur que, dans The Lynchers (1973), le héros, un temps séduit par la rhétorique révolutionnaire d'un prophète d'Apocalypse, finisse par récuser les positions extrémistes du mouvement « Black Power ». Cependant, dès la fin des années 1960, Wideman s'éloigne d'Eliot et de Joyce, découvre Jean Toomer, Richard Wright et d'autres écrivains noirs, en même temps que les récits d'esclaves du xixe siècle, et se met à la recherche d'un nouvel idiome qui ne serait plus inféodé à la culture blanche et qui saurait capter la musicalité et les rythmes du parler noir. De plus, des événements survenus dans sa famille viennent aiguiser sa conscience ethnique : en 1975, Robby, son frère cadet, est condamné à la prison à vie pour un meurtre commis lors d'un hold-up. Dans Suis-je le gardien de mon frère ? (Brothers and Keepers, 1985), les deux frères s'interrogeront en un poignant duo sur leurs parcours contrastés.

Autre événement : la mort de sa grand-mère maternelle en 1974, qui précipite les retrouvailles de Wideman avec le Homewood de son enfance. Dans l'œuvre de fiction, le retour aux origines s'accomplit en 1981, près de dix ans après The Lynchers, avecDamballah, le recueil de douze nouvelles qui forme le premier volet de la « trilogie Homewood », chronique familiale mi-réaliste, mi-rêveuse, nourrie de contes et de légendes, qui suit les ramifications de l'arbre généalogique des Wideman, planté au xixe siècle sur Bruston Hill par Sybela Owens, la mère fondatrice. Le deuxième volume, Hiding Place, paraît la même année, le troisième, Sent for youYesterday, récompensé par le Faulkner/Pen Award, en 1983. À travers cette trilogie, Wideman sort de son exil intérieur pour rejoindre son peuple et faire sien tout son héritage.

Depuis la fin des années 1980, Wideman n'a cessé de publier romans (Reuben, 1987 ; Philadelphia Fire, 1990 ; The Cattle Killing, 1996 ; TwoCities, 1998 ; Fanon, 2008), recueils de nouvelles (Fever, 1989 ; All Stories are True, 1992 ; God's Gym, 2005) et essais (Fatheralong :A Meditation on Fathers and Sons, Race and Society, 1994). Ses textes tiennent tous de l'autobiographie, y compris les romans, où abondent – de l'avocat chétif de Reuben et de Cudjœ dans Philadelphia Fire (L'Incendie de Philadelphie) au narrateur de The Cattle Killing (Le Massacre du bétail) – les doubles fictifs[...]

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André BLEIKASTEN. WIDEMAN JOHN EDGAR (1941- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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