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CIRIANI HENRI (1936- )

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Volume et verticalité

Dans les années 1990, Henri Ciriani reste attaché à une approche formelle de l'urbanisme et, fidèle aux idéaux « collectivistes », travaille dans le sens de la solidité et de la puissance l'articulation de masses verticales et horizontales, la silhouette des édifices, fussent-ils des barres enrichies par un jeu complexe de pleins et de vides. Ainsi dans ses projets aux Pays-Bas, à Rotterdam (projet urbain, 1988), Groningue (gratte-ciel, 1993), Nimègue (gratte-ciel, 1995) ou La Haye (tour d'habitation, 1995).

Pour ce qui est de l'intérieur du logement, il développe une réflexion plus pessimiste (ou simplement réaliste). Affirmant qu'il existe en ce domaine des « invariants », il n'a jamais cherché à y modifier radicalement le mode de vie des occupants. Il concentre surtout ses efforts sur des effets de lumière qui lui servent à « travailler l'espace » plus qu'à l'inonder de clarté et qui visent à « dilater » les volumes intérieurs pour obtenir, dit-il, que « 10 mètres carrés en paraissent 12 ». Il réussit souvent à agencer des appartements d'une belle composition, comme les cellules en duplex d'un ensemble de logements sociaux rue du Chevaleret (1991), au parc de Bercy (1994) à Paris ou à Colombes (Hauts-de-Seine) en 1995.

Soucieux que chacune de ses réalisations ait valeur d'exemple et soit porteuse d'une démonstration pédagogique, il mène diverses expériences sur la qualité intérieure de l'architecture, les parcours dans un espace continu et la polychromie, notamment à l'occasion de la construction de quelques programmes publics plus modestes : une crèche à Saint-Denis (1983), la cuisine centrale de l'hôpital Saint-Antoine à Paris (1985), un local collectif résidentiel à Lognes (1987), un centre de la petite enfance à Torcy (1989).

Peu intéressé par la construction en tant qu'assemblage de matériaux, aimant le béton armé pour son abstraction et sa parfaite plasticité, Henri Ciriani est en quête d'émotion visuelle et de sensations optiques, colorées et physiques. Il développe une sorte de phénoménologie intuitive de l'espace et de l'architecture, poursuivie dans ce qui serait sa « vérité » intrinsèque. Il y a, dans cette recherche, une indéniable dimension métaphysique et spiritualiste, surtout dans cette tendance à sacraliser l'espace et la lumière naturelle. Elle s'épanouit dans le musée-historial de la Grande Guerre (1992), œuvre d'une rare sérénité. Il y joue brillamment sur le thème de la « promenade architecturale » qu'avait inventé autrefois Le Corbusier, y organisant des itinéraires fluides et souplement articulés et inscrivant très élégamment son édifice au bord d'un étang, adossé à la forteresse en ruine de Péronne. Ce dialogue amical et sensible avec l'histoire, Henri Ciriani le renoue avec l'école de Stadspoort, dans le centre de Groningue aux Pays-Bas (2001) ou le palais de justice de Pontoise (2005).

Henri Ciriani (qui a obtenu le grand prix de l'architecture en 1983) jouit d'un prestige considérable auprès de ses étudiants de l’École nationale supérieure d'architecture de Paris-Belleville, où il enseigne de 1969 à 2002. Le programme pédagogique très structuré qu'il a élaboré depuis 1978 avec ses collègues du groupe Uno a attiré plusieurs générations d'étudiants fervents. Parmi ses nombreux élèves, citons notamment Michel Kagan ou Jacques Ripault. Ciriani synthétise ses interrogations sur les formes de l’habitat et sur le projet d’architecture dans des entretiens avec Laurent Baudouin et Christian Devillers (Vivre haut : méditation en paroles et dessins, 2011).

Henri Ciriani incarne le seul courant d'architecture un peu solidement constitué qui se soit fait jour dans la France contemporaine, avec celui, plus diffus, qui[...]

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François CHASLIN. CIRIANI HENRI (1936- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 18/12/2013