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GÉOCHIMIE

Géochimie isotopique et exemples d'application

À partir des années 1950, les progrès techniques en matière de spectrométrie de masse ont permis le développement d'une autre branche de la géologie : la géochimie isotopique. Deux atomes sont dits isotopes d'un élément donné lorsqu'ils possèdent le même nombre de protons (ou numéro atomique) mais un nombre de neutrons différents : les deux isotopes ont donc des masses distinctes. Par exemple, le carbone (C), élément de numéro atomique 6, possède plusieurs isotopes : le plus abondant (98,9 p. 100), de masse 12, noté 12C, mais aussi l'isotope stable de masse 13 13C (1,1 p. 100) et enfin le carbone 14, isotope radioactif présent sur Terre à l'état de trace. Aussi faibles qu'elles soient, les variations naturelles des abondances isotopiques proviennent majoritairement de deux phénomènes, la désintégration radioactive et l'effet thermodynamique de leur faible différence de masse. La géochimie isotopique s'articule donc autour de deux champs : l'étude des isotopes radioactifs (par exemple 14C) et celle des isotopes stables (par exemple 13C, 12C).

Isotopes radioactifs

Un isotope radioactif est constitué d'un noyau atomique instable qui se désintègre spontanément en un noyau plus stable (isotope radiogénique) en émettant de l'énergie sous forme d'un rayonnement. Par exemple, lors du processus de désintégration β, le noyau instable père émet un électron (particule β) et un antineutrino (ν). C'est le cas du couple rubidium (père) - strontium (fils) :

Systèmes isotopiques utilisés en datation radiochronologique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Systèmes isotopiques utilisés en datation radiochronologique

La probabilité qu'un noyau radioactif se désintègre par unité de temps est constante car les énergies mises en jeu dans les liaisons nucléaires sont très grandes par rapport à celles libérées par les processus géologiques. Cette probabilité, appelée constante de désintégration et notée λ, permet de définir pour l'élément considéré une période (notée τ), intervalle de temps au terme duquel la moitié des éléments pères radioactifs se sont désintégrés (cf. tableau). Il est communément admis que lorsque dix périodes se sont écoulées, l'élément père considéré a disparu. La conservation du nombre total d'atomes père et fils permettra d'utiliser le rapport fils/père comme chronomètre. Ainsi, l'étude des systèmes radioactifs permet de réaliser des datations radiochronologiques. Il s'agit de la principale application de la géochimie des isotopes instables.

Le développement de la radiochronologie a révolutionné la géologie. En effet, cette technique a permis de déterminer l'âge de la Terre – estimé en 1956 par Clair Patterson à 4,55 milliards d'années –, mettant ainsi un terme à une longue controverse historique.

De nos jours, de nombreux systèmes isotopiques sont utilisés comme chronomètres et permettent de dater des objets d'âge varié. La gamme d'âge mesurable dépend de la période τ du système considéré : en effet, l'objet ne doit pas être plus vieux qu'environ 10τ. Ainsi, le 14C de période τ = 5 730 ans est utilisé pour dater précisément des objets récents (moins de 50 000 ans), tandis que le couple 87Rb-87Sr de période τ = 48,8 milliards d'années donnera des informations sur des objets datant de plusieurs centaines de millions d'années (cf. tableau).

Isotopes stables

Un isotope est stable s'il ne présente pas de radioactivité décelable. La géochimie des isotopes stables s'intéresse aux déviations du rapport entre deux isotopes d'un élément donné vis-à-vis d'un ratio standard et à l'interprétation de ces variations dans des échantillons naturels (roches, sols, eaux...). Ces écarts sont dus à une concentration des isotopes lourds dans les liaisons les plus stables : on parle de fractionnement isotopique. On utilise généralement[...]

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Écrit par

  • : chercheuse au laboratoire de géologie de Lyon Terre, planètes, environnement, géochimie, agrégée préparatrice à l'École normale supérieure de Lyon

Classification

Pour citer cet article

Marie-Laure PONS. GÉOCHIMIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Affinité des éléments chimiques pour les enveloppes terrestres et classification de Goldschmidt - crédits : Encyclopædia Universalis France

Affinité des éléments chimiques pour les enveloppes terrestres et classification de Goldschmidt

Systèmes isotopiques utilisés en datation radiochronologique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Systèmes isotopiques utilisés en datation radiochronologique

Variation des isotopes de l'oxygène avec la température atmosphérique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Variation des isotopes de l'oxygène avec la température atmosphérique

Autres références

  • TERRE - Planète Terre

    • Écrit par Jean AUBOUIN, Jean KOVALEVSKY
    • 9 225 mots
    • 9 médias

    Avant d'être un concept, la Terre fut une donnée : d'abord, la Terre nourricière – autrement dit, la « terre végétale » –, puis, la Terre où l'homme vit, par opposition à la mer, c'est-à-dire les terres émergées. Tout naturellement, cette Terre, siège de l'humanité, était le centre du monde, qui s'ordonnait...

  • ANDÉSITES ET DIORITES

    • Écrit par Jean-Paul CARRON, Universalis, Maurice LELUBRE, René MAURY
    • 2 066 mots
    • 2 médias
    Du point de vue des éléments majeurs, les andésites se caractérisent par des teneurs élevées en calcium et aluminium et faibles en titane. Leur rapport Mg/(Mg + Fe), souvent voisin de 0,5, est cependant susceptible de larges variations ; le rapport Fe2O3/FeO, généralement élevé, témoigne d'une...
  • CARBONATES

    • Écrit par Marc DARDENNE, André JAUZEIN
    • 5 049 mots
    • 12 médias
    Alors que la dolomite a été synthétisée à température et pression de CO2 élevées par Graf et Goldsmith (1955), sa synthèse, dans les conditions de température et pression ordinaires du milieu marin actuel, est l'un des problèmes les plus intéressants de la géochimie. L'observation de sédiments...
  • CYCLES BIOGÉOCHIMIQUES

    • Écrit par Jean-Claude DUPLESSY
    • 7 878 mots
    • 6 médias

    L'activité de la Terre est incessante : toutes ses couches – du noyau à la plus haute atmosphère – sont animées de continuels mouvements et, surtout, ses enveloppes superficielles – l'atmosphère, les océans et la surface des continents – abritent la vie. Les atomes et les molécules qui constituent...

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Voir aussi