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NOURISSIER FRANÇOIS (1927-2011)

François Nourissier est né à Paris en 1927. Il raconte avec humour dans Le Musée de l'homme (1978) qu'il s'était inventé, à une certaine époque, une identité de « Lorrain de fantaisie », à défaut de pouvoir produire des origines sociales plus légitimées. Il a huit ans quand son père meurt subitement à côté de lui, tandis qu'ils sont au cinéma. Le monde de son enfance est étouffant, catholique et féminin. Sans doute faut-il voir là l'origine de composantes essentielles de sa personnalité. En 1945, il fait partie des bénévoles qui, à l'hôtel Lutétia, accueillent les déportés qui reviennent des camps, et il publie, entre 1949 et 1952, des travaux sur les personnes déplacées, tout en poursuivant des études supérieures à Sciences Po. Il occupe d'importantes fonctions éditoriales, chez Denoël de 1952 à 1955, chez Grasset de 1958 à 1996. Élu à l'académie Goncourt en 1977, qu'il quittera en 2008, il assume les contraintes de la position de secrétaire général à partir de 1985, puis de président de 1996 à 2002. Sa connaissance intime du milieu littéraire se retrouve dans plusieurs de ses ouvrages, comme Les Chiens à fouetter (1957).

Nombre des événements de la vie personnelle de François Nourissier seront par la suite rapportés dans ses ouvrages, pour se fondre dans le seul univers qui compte à ses yeux : la littérature. Car il sait depuis toujours que sa vocation est l'écriture. Son premier roman, L'Eau grise (1951), republié en 1986 avec une Préface très éclairante, est remarqué par Jacques Chardonne, ce qui lui ouvre les portes de la reconnaissance littéraire. Il se sent proche du groupe des Hussards (Roger Nimier, Antoine Blondin, Jacques Laurent, Michel Déon), parce qu'il partage leur refus d'une littérature asservie à une idéologie, et que – à l'exception notable de Céline – il admire le talent littéraire d'auteurs qui se sont compromis avec l'occupant allemand ou qui traditionnellement sont considérés comme des écrivains « réactionnaires ». Il fallait en effet faire preuve, au début des années 1950, d'une grande autonomie d'esprit pour revendiquer une filiation avec Chardonne ou Morand, Montherlant ou Drieu la Rochelle, voire Bernanos et Barrès. François Nourissier acquiert de la sorte, au sein de la république des Lettres, une réputation d'homme « de droite », qui ne le quittera jamais tout à fait, qu'il assume et sur laquelle il s'est longuement expliqué (Mauvais Genre, 1994), marquant son attachement à l'idée d'une patrie française, son refus de l'intellectualisme engagé, son goût pour les maisons bourgeoises (La Maison mélancolie, 2005), les automobiles ou les beaux objets, la discipline du corps et de l'allure.

La carrière de François Nourissier est rythmée par ses activités multiples au sein du monde des lettres. En 1952, il prend la succession de Jacques Laurent à La Parisienne pour en faire une revue moins politique et plus littéraire. À L'Express, aux Nouvelles littéraires, au Figaro et au Figaro Magazine, au Point, il livre d'innombrables articles qui contribuent largement à faire connaître au grand public les livres nouveaux. Sa vie privée alimente une production romanesque abondante, dont la dimension autobiographique n'a cessé de prendre de l'importance, au point de lui faire affirmer que la fiction, tout compte fait, l'intéresse assez peu. Il fait exception, néanmoins, pour L'Empire des nuages (1981) ou Le Gardien des ruines (1992), roman qui brosse un tableau saisissant de la société française de 1938 à 1990.

L'écrivain s'observe avec étonnement, et dégoût parfois. Le style incisif, la pointe sèche du moraliste stigmatisent les faiblesses d'une âme inquiète qui souffre de se sentir sans grandeur (Portrait d'un indifférent[...]

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Pour citer cet article

Michel P. SCHMITT. NOURISSIER FRANÇOIS (1927-2011) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • À DÉFAUT DE GÉNIE (F. Nourissier)

    • Écrit par Philippe DULAC
    • 995 mots

    Il se peut que, arrivés au soir de leur existence, la plupart des écrivains aient la tentation de devenir l'ultime et unique sujet de leur œuvre. Les uns dans le but d'ériger eux-mêmes leur tombeau, sinon leur mausolée : ce syndrome de Chateaubriand a souvent frappé la littérature française. Les autres,...

Voir aussi