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FRANÇOIS DE SALES (1567-1622)

La dévotion dans la vie quotidienne

Les préoccupations de François de Sales sont au départ surtout pratiques et ascétiques et elles visent l'ensemble des chrétiens. Il cherche à conduire le fidèle à un engagement total de sa personne dans la vie religieuse qui constitue à ses yeux la « dévotion ». Cet engagement s'impose à tous comme une exigence générale, quelle que soit la situation où l'on se trouve placé ; mais, en même temps, il ouvre à chacun la voie de la sainteté qui n'est plus désormais l'apanage de ceux qui se sont retirés du monde : de cette manière, François de Sales fonde un type intramondain de sainteté qui constitue une nouveauté. Pour y parvenir, il propose à ses lecteurs, dans l'Introduction, un certain nombre d'attitudes concrètes, extérieures et intérieures, qui rendent la perfection à la fois accessible et compatible avec les exigences de la vie ordinaire. Il le fait avec une souplesse, une pénétration et un sens de l'humain dont ses contemporains ont été tellement frappés qu'ils lui ont reproché parfois de sacrifier l'austérité du christianisme ; reproche injuste, car, dans les faits, le saint se montrait souvent très sévère, comme en ont témoigné tous ses dirigés. Mais il est sans cesse préoccupé de s'en tenir aux limites des possibilités de l'être humain, d'où la grande importance, dans ses œuvres comme dans sa correspondance, accordée à l'analyse intérieure réelle et concrète : à ce titre, il a fortement contribué à accréditer le psychologisme dans les cadres de la spiritualité chrétienne, et à inaugurer un type de direction qui met au premier plan l'adaptation au cas individuel. Servi par des qualités littéraires peu communes, il a, dans l'Introduction, donné à la littérature spirituelle d'inoubliables pages, par exemple sur la prière, les obligations familiales, la vie conjugale, où la solidité du fond se joint à la beauté et à la poésie de la forme, créant ainsi une spiritualité de la vie quotidienne et du devoir d'état qui est demeurée une constante de la pensée chrétienne.

Écrite pour un très vaste public, l'Introduction s'en tient aux formes habituelles de la vie intérieure et aux problèmes immédiatement pratiques. Pourtant, dès cette date, à travers les expériences mystiques de Mme de Chantal, et aussi à cause de sa propre évolution spirituelle, le saint découvrait des horizons plus vastes, et cet enrichissement se manifeste dans le Traité de l'amour de Dieu. Avec beaucoup de ses contemporains, François de Sales considère la volonté comme la faculté essentielle de l'esprit humain, celle dans laquelle, pour ainsi dire, l'homme se résume. Tout le problème est donc, selon lui, de parvenir à la parfaite conformité de la volonté humaine à la volonté divine. D'autre part, sa formation humaniste se retrouve dans la vision délibérément optimiste qu'il veut garder de la nature humaine, que la chute n'a point entièrement viciée et pervertie. Même déchue, la créature garde encore une orientation spirituelle qui fait de Dieu le terme même de sa faculté de connaître et d'aimer, de telle sorte que Dieu est d'abord Dieu du cœur humain, que les affections se tournent spontanément vers lui, et que, malgré la faute originelle, l'homme a gardé la sainte inclination de l'aimer par-dessus toutes choses. Cependant, François évite le reproche de pélagianisme en insistant sur le fait que le péché interdit désormais tout exercice naturel de cette inclination et qu'il faut nécessairement que la grâce intervienne. On doit reconnaître que, sur ce point, il se sépare du pessimisme augustinien, alors que par ailleurs sa pensée doit beaucoup à l'évêque d'Hippone.

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut catholique de Paris

Classification

Pour citer cet article

Louis COGNET. FRANÇOIS DE SALES (1567-1622) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • JEANNE-FRANÇOISE FRÉMYOT DE CHANTAL sainte (1572-1641)

    • Écrit par Jean-Robert ARMOGATHE
    • 215 mots

    Fondatrice de la Visitation. Issue d'une grande famille de parlementaires de Dijon, Jeanne Frémyot épouse en 1592 le baron de Chantal ; le couple a six enfants lorsque le baron meurt dans un accident de chasse, en 1601 ; après une période de crise spirituelle, Jeanne de Chantal rencontre ...

  • VISITANDINES

    • Écrit par André DUVAL
    • 312 mots

    Religieuses contemplatives dont l'ordre fut fondé en 1610 par saint François de Sales et sainte Jeanne-Françoise Frémyot de Chantal (1572-1641) à l'intention des personnes âgées ou de santé fragile auxquelles les autres ordres sont interdits. En fait, à l'origine, Jeanne et ses compagnes,...

Voir aussi