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ARRABAL FERNANDO (1932- )

Arrabal est né à Melilla, dans le Maroc espagnol, sous la république. Son père, officier de carrière, est du reste connu pour ses opinions républicaines. Dès le début du soulèvement de l'armée d'Afrique, en 1936, ce dernier est arrêté puis condamné à mort. Sa peine sera commuée en trente ans de prison, mais il mourra en 1942, lors d'« une tentative d'évasion ». Fernando n'oubliera jamais le destin de son père. D'autant plus que sa mère, par crainte du régime, cache les portraits de son mari, qu'elle dénonce auprès de son fils comme irresponsable.

Après la fin de la guerre civile, Arrabal vient avec sa mère à Madrid, en 1940. Il y vit une enfance puis une adolescence pauvres, assez chaotiques. Il écrit sa première pièce, Pique-nique en campagne en 1952. Celle-ci sera suivie du Tricycle (1953), qui remporte en 1954 le prix du Théâtre d'essai.

Cette même année, Arrabal émigre en France. Il subit les conséquences de son enfance malheureuse et doit passer deux ans en sanatorium. Il rencontre une Française, Luce Moreau, qui, dit-il, lui donne la possibilité d'écrire en français. En 1958 paraît en France un premier volume de pièces réunissant notamment Fando et Lis et Le Cimetière des voitures. Tous les thèmes d'Arrabal y sont déjà présents. La représentation théâtrale est considérée comme une cérémonie au cours de laquelle auteur, comédiens et spectateurs exorcisent leurs démons intimes. Les personnages sont tour à tour bourreaux et victimes. Sadisme, sexe, blasphèmes sont les moteurs principaux d'une œuvre assez répétitive et abondante. Quelques titres émergent : L'Architecte et l'Empereur d'Assyrie (1967), Le Jardin des délices (1969), Et ils passeront des menottes aux fleurs (1970), Le Roi de Sodome (1979). Mais, peu à peu, la provocation devient cliché, la violence tourne au kitch. L'œuvre d'Arrabal s'essouffle après la fin des années 1965-1975, qui avaient marqué une période de contestation tant politique que culturelle. En 1988, il crée La Traversée de l'empire au théâtre de la Colline, à Paris. Arrabal a tenté de théoriser ses conceptions théâtrales et artistiques avec le mouvement Panique. Celui-ci a regroupé, entre 1960 et 1963, une dizaine de peintres, d'écrivains et de cinéastes, parmi lesquels Roland Topor, Jacques Sternberg et Alejandro Jodorowski, qui voulaient retrouver le souffle du surréalisme. Plus qu'une école artistique, Panique voulait définir une « manière d'être ».

Romancier (L'Enterrement de la sardine, 1961 ; Fêtes et rites de la confusion, 1967 ; L’Extravagante Croisade d’un castrat amoureux, 1989 ; Porté disparu, 2000), Arrabal a également réalisé plusieurs films. On retient notamment Viva la muerte (1971), film autobiographique inspiré d'un premier roman paru en 1959 (Baal Babylone), J'irai comme un cheval fou (1973), Adieu, Babylone ! (1992), Jorge Luis Borges (1998).

En 1984, répondant en quelque sorte à sa première Lettre au général Franco publiée quelques années avant, il écrit la Lettre à Fidel Castro, dans laquelle il se livre à une attaque en règle contre le régime castriste, dénonçant la dictature et la domination « raciste » d'une poignée de Blancs sur les populations d'origine.

— Jean-Pierre ÉNARD

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Pour citer cet article

Jean-Pierre ÉNARD. ARRABAL FERNANDO (1932- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ESPAGNE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par Jean CASSOU, Corinne CRISTINI, Jean-Pierre RESSOT
    • 13 749 mots
    • 4 médias
    ...manifeste guère que chez José Martín Recuerda (Las Arrecogías de Santa María Egipciaca[Les Recluses de Santa Maria Egipciaca], 1970) et surtout chez un dramaturge qui, exilé par le franquisme, a dû faire sa carrière en France et aux États-Unis : Fernando Arrabal. Son théâtre, d'abord symbolique...
  • GARCÍA VICTOR (1934-1982)

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  • THÉÂTRE OCCIDENTAL - Le nouveau théâtre

    • Écrit par Bernard DORT
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    Cette dernière fête, c'est aussi celle que, avec beaucoup moins de raffinement, entendait susciter Fernando Arrabal grâce à son « théâtre panique » : il s'agit de transformer la représentation en un grand feu de joie où se mêleraient et se consumeraient tout ensemble « la tragédie...

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