EXTRAVERSION & INTROVERSION
L'opposition entre caractère extraverti et caractère introverti est due à C. G. Jung (dans Sur les conflits de l'âme infantile, 1910, et surtout dans Types psychologiques, 1920), qui voulait concilier ainsi les positions de Freud et celles d'Adler. « Chez Adler, écrit Jung en 1928, l'accent porte sur un sujet qui se met en sûreté et qui cherche la suprématie vis-à-vis de n'importe quel objet ; chez Freud, au contraire, l'accent porte entièrement sur les objets qui, suivant leurs propriétés définies, sont favorables ou contraires aux convoitises du sujet. »
L'extraversion est alors conçue comme la condition dans laquelle l'objet a une plus haute valeur que le sujet, et l'introversion comme celle dans laquelle le sujet a un plus haut niveau de valeur que l'objet. Il s'agit ainsi de deux pôles de la relation de la personne, vers lesquels chacun tend plus ou moins, et par conséquent de deux types de caractère. Il s'agit d'un type d'adaptation de l'humanité à la nature : l'extraversion est une attaque, visant à l'accroissement de la fécondité de l'objet, ce qui s'accompagne d'une moindre défense de l'individu ; l'introversion est une défense du sujet, corrélative d'une diminution de la fécondité de l'objet. Cette opposition extraversion-introversion peut encore se comprendre comme le substratum sur lequel se développent les fonctions psychiques (sensation, pensée, sentiment, intuition), l'homme parfaitement équilibré combinant harmonieusement les deux mécanismes.
L'extraverti est tourné vers l'objet et le monde ; il est « objectif », expansif, intuitif, spontané, observateur ; sa perception est pure, non troublée par l'affectivité. Il adhère au milieu, est doué d'excellentes capacités d'adaptation sociale, a de l'entregent, aime la nouveauté et est sensible aux modes ; à la limite, il peut se perdre dans l'objet. Instinctif, il obéit sans le savoir à l'inconscient collectif.
L'introverti est tourné vers sa subjectivité et ignore le monde et les autres ; il met au premier plan sa vie intérieure et interpose le voile de son intériorité entre lui et sa perception de l'objet. Il est timide et défiant vis-à-vis de son premier mouvement, ce qui l'amène à réfréner sa spontanéité. Il est orgueilleux, inadapté, replié sur soi-même, mystique, rêveur, froid.
Jung, cependant, n'a pas fait la part égale entre ces deux types, que l'on peut se figurer par Sancho Pança et don Quichotte. Sa description de l'introverti est nettement péjorative et est rapportée à des sujets qui sont sur le chemin de la schizophrénie. Pourtant, si l'on reprend l'examen de cette typologie (inspirée sans doute des types objectif et subjectif d'A. Binet), on en découvre la correspondance évidente avec d'autres terminologies, qui opposent, par exemple, extatique et emménétique (Aristote), primaire et secondaire (O. Gross, puis Heymans et Le Senne), cyclothymes et schizothymes (Kretschmer).
Freud adopta le terme d'introversion pour désigner « le retrait de la libido sur des objets imaginaires ou fantasmes » (1912) ; il s'agirait alors d'une étape entre la frustration et la répression. Les partisans de Jung pensent que Freud n'a vu dans l'introversion que son aspect narcissique et qu'il lui a échappé, à lui qui était extraverti, que l'introversion est « l'approfondissement du non-moi psychologique et objectif par un moi conscient de ses limitations, de ses incomplétudes, et qui cherche à s'orienter, grâce à des points de repère, dans son monde intérieur, et à découvrir les ouvertures de celui-ci » (R. Cahen).
Très proches du couple extraversion-introversion sont ceux d'extraspectant-introspectant (J. Toulemonde)[...]
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Écrit par
- Georges TORRIS : docteur en médecine et en philosophie
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