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DHEEPAN (J. Audiard)

No fire zone

En effet, le film bascule dans la violence barbare quand Dheepan est rattrapé par son passé (le vieux colonel insurgé l’enrôle de force dans son armée secrète), tandis que Yaline croit pouvoir se débrouiller dans le chaos hors-la-loi, en travaillant chez un dangereux trafiquant sorti de prison avec un bracelet électronique (l’excellent Vincent Rottiers), par ailleurs fils douloureux d’un père kabyle mutique. La tension monte et tout craque lorsque les bandes rivales prennent les armes dans la cité. Affolé, Dheepan se croit revenu dans les sinistres nofire zones transformées en camps d’extermination au Sri Lanka. À son tour, il délimite des frontières pour maintenir l’orage hors de sa minuscule sphère privée, mais finit par franchir lui-même ces limites quand Yaline est prise à parti. Il redevient alors le tueur féroce qu’il avait dû être autrefois. Redoutée, repoussée, l’apocalypse ne sera pas évitée.

Pourtant, tout à coup, un changement de décor a lieu : sauvés par une audacieuse ellipse scénaristique de ce déchaînement de violence, les trois héros forment enfin une vraie famille heureuse au cœur de l’accueillant milieu bourgeois d’une riche banlieue londonienne. Rêve ? Réalité ? Probable création de la subjectivité du personnage féminin, cet épilogue, noyé d’une musique fortissimo qui en souligne la dimension utopique, résonne comme une insolente caricature des happy ends les plus conventionnels. Le spectacle a été rude. L’œuvre de déconstruction des idées reçues a rempli brillamment son office.

— René PRÉDAL

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Écrit par

  • : professeur honoraire d'histoire et esthétique du cinéma, département des arts du spectacle de l'université de Caen

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Pour citer cet article

René PRÉDAL. DHEEPAN (J. Audiard) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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