Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CAHUN CLAUDE (1894-1954)

Fille du journaliste Maurice Schwob, directeur du journal nantais Le Phare de la Loire, nièce de l'écrivain Marcel Schwob, Claude Cahun naît Lucy Schwob à Nantes en 1894. Envoyée dans un collège anglais pour échapper au climat antisémite lié à l'affaire Dreyfus, elle fait ensuite des études de lettres et de philosophie à la Sorbonne. En 1909, elle rencontre Suzanne Malherbe qui prit pour pseudonyme Marcel Moore, dessinatrice avec laquelle elle partage sa vie, au 70 bis, rue Notre-Dame-des-Champs de 1922 à 1937, puis dans leur maison La Rocquaise à Jersey. Poète, essayiste, critique littéraire, traductrice, nouvelliste, elle adopte le pseudonyme de Claude Cahun dès 1917. Elle collabore au Journal littéraire et au Mercure de France qui publie Héroïnes (1925), « sept textes courts et ironiques » sur les mythes féminins. De 1927 à 1930, elle écrit aussi pour le théâtre. Ses textes, rassemblés sous le titre Écrits, seront publiés en 2002. De 1927 à 1930, elle fait aussi du théâtre. Mais Claude Cahun est surtout reconnue pour son œuvre photographique – autoportraits, photomontages, mises en scène d'objets, portraits –, notamment grâce à la biographie de François Leperlier (Claude Cahun, l'exotisme intérieur, 2006).

« Sous ce masque un autre masque ; je n'en finirai pas de soulever tous ces visages », écrit-elle dans Aveux non avenus, « essais-poèmes » autobiographiques accompagnés de dix photomontages réalisés avec Moore et publiés en 1930. Dès l'âge de vingt ans, Cahun utilise la photographie pour réaliser des autoportraits ambigus où domine l'androgynie et où revient de façon récurrente la figure du double. Son étrange autoportrait au crâne anamorphosé est publié en 1930 par la revue Bifur. Tête rasée ou cheveux teints en rose ou en doré, maquillée, grimée ou déguisée, portant un masque ou des lunettes opaques, elle se met en scène en garçonne, en matelot ou en déesse hindoue... Une quête d'identité explorée par le truchement de miroirs, de surimpressions et de dédoublements qui lui permettent de mettre son visage en écho comme dans Que me veux-tu ? (1928), où face et profil se toisent. Des autoportraits d'une modernité stupéfiante dans lesquels Claude Cahun, à la recherche d'elle-même, se révèle dans toute sa singularité et son excentricité, traduisant visuellement cette volonté de dépasser les genres sexuels. « Neutre est le seul genre qui me convienne toujours », affirmait-elle.

Cette liberté face aux images irrigue aussi ses photomontages et ses mises en scène d'objets hétéroclites réalisés dans l'esprit des surréalistes. Ainsi de ses « tableaux photographiques » rehaussés de couleurs illustrant les poèmes de Lise Deharme dans Le Cœur de pic (1937). Liée à Henri Michaux, Georges Ribemont-Dessaignes, Robert Desnos, René Crevel, André Breton, Claude Cahun fréquente le groupe surréaliste et participe à l'Exposition surréaliste d'objets qui se tient en 1936 à la galerie Charles Ratton à Paris. On lui doit notamment des portraits de Michaux, Desnos, Breton.

Indépendante dans ses choix politiques, elle milite à l'Association des écrivains et artistes révolutionnaires en 1932, participe à la fondation du groupe Contre-Attaque (1935-1936) avec Georges Bataille, soutient la revue homosexuelle Inversions dans laquelle elle « réclame la liberté générale des mœurs ». Durant l'occupation de Jersey par les Allemands, Moore et elle fabriquent et diffusent des tracts de contre-propagande. Toutes deux seront arrêtées et condamnées à mort en 1944, puis libérées de justesse en 1945. Après la guerre, Claude Cahun rédige Confidences au miroir et réalise ses derniers autoportraits, avant de s'éteindre le 8 décembre 1954 à Saint-Hélier sur l'île de Jersey. Son œuvre singulière anticipe celle de Cindy Sherman[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Armelle CANITROT. CAHUN CLAUDE (1894-1954) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • PHOTOGRAPHIE (art) - Un art multiple

    • Écrit par Hervé LE GOFF, Jean-Claude LEMAGNY
    • 10 750 mots
    • 21 médias
    L'autoportrait, tel que l'avait initié en son temps Claude Cahun, tient une place importante dans la production contemporaine, parfois jusqu'à constituer l'intégralité de l'œuvre de l'auteur. L'Américaine Cindy Sherman se met en scène depuis 1977, tout au long de plusieurs...

Voir aussi