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CHAMPS DE CASTILLE, Antonio Machado Fiche de lecture

L'installation à Soria, en Castille, d'Antonio Machado (1875-1939), son mariage avec Leonor Izquierdo, en 1909, un séjour à Paris en 1911, tels sont les événements qui précédent la publication en 1912 de Champs de Castille. Après les effusions sentimentales des premiers recueils (Solitudes, 1903 ; Solitudes. Galeries. Nouveaux Poèmes, 1907), ce livre marque une étape nouvelle.

L'avenir de l'Espagne

Le recueil s'ouvre sur un « Portrait », où le poète présente son art poétique et ses valeurs éthiques : « Méprisant la romance des ténors à voix creuse/ et le chœur des grillons qui chantent à la lune,/ je cherche à démêler les voix des échos ;/ parmi toutes les voix, je n'en écoute qu'une. » Le souci d'objectivité s'inscrit dans la prise de conscience du « problème de l'Espagne » de la Génération de 98, mouvement dont les principaux représentants sont Antonio Machado et Miguel de Unamuno, et qui s'interroge sur l'avenir politique de l'Espagne après l'effondrement de son empire colonial, en 1898. Cette prise de conscience donne lieu à une suite de compositions évoquant le paysage, l'histoire ou les gens de Castille : « Sur les bords du Douro », « Par les terres d'Espagne », et « Terres de Soria » où l'art du peintre se montre d'une sobriété admirable : « Soria du froid, Soria pure,/ capitale d'Extrémadure,/ avec son château guerrier/ tombant en ruine, sur le Douro,/ avec ses murailles rongées/ et ses maisons toutes noircies... »

Le romance (composition poétique formée d'octosyllabes) intitulé « La Terre d'Alvargonzález », dans la ligne épico-lyrique du romancero, recueil de légendes guerrières évoquant la lutte contre les Maures, contient aussi des paysages transfigurés par le regard. Mais dans un décor champêtre, c'est cette fois un drame de sang – un parricide – qui se joue.

Dans une autre veine, le livre contient vingt-neuf « Proverbes et chansons », couplets sentencieux, malicieux ou satiriques, qui annoncent la manière avec laquelle, plus tard, Juan de Mairena – double ironique de l'auteur – donnera de profondes leçons de sagesse. Hormis d'autres poésies, assez disparates, deux « Éloges » se distinguent : l'un célèbre « le quichottesque don Miguel de Unamuno » qui « à un peuple de muletiers,/ écervelés, joueurs et usuriers,/ [...] dicte des leçons de chevalerie » ; l'autre est un écho lyrique à un recueil de Juan Ramón Jiménez, Arias tristes (1903).

Plus de quarante poésies furent ajoutées à Champs de Castille, dans l'édition des Poésies complètes de 1917 : nouvelles compositions sur la Castille (Rives du Douro) ; évocations de Leonor, la jeune épouse, morte de tuberculose (À un orme desséché, À José María Palacio) ; poèmes dénonçant la situation morale ou politique de l'Andalousie – où l'auteur est revenu s'installer – ou de l'Espagne en général (Au dieu ibère, Du passé éphémère, Complaintes des vertus et stances sur la mort de don Guido). Divers « Éloges » – aux philosophes Francisco Giner de los Ríos et José Ortega y Gasset, au poète Rubén Darío – s'ajoutent aux précédents.

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Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

Classification

Pour citer cet article

Bernard SESÉ. CHAMPS DE CASTILLE, Antonio Machado - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MACHADO ANTONIO (1875-1939)

    • Écrit par Cesare SEGRE
    • 2 318 mots
    En 1912 paraît l'autre grand recueil poétique de Machado, Campos de Castilla. Celui-ci est dominé, dès le titre, par les vastes plaines castillanes, au centre desquelles le poète avait vécu de 1907 à 1912, comme professeur de français à Soria. Séjour d'abord serein, rendu heureux par le mariage...

Voir aussi