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Back to Heldon, HELDON

Le musicien français Richard Pinhas (né en 1951) fait ses débuts à la fin des années 1960, comme guitariste au sein du groupe Blues Convention, avec Klaus Blasquiz, le futur chanteur de Magma. Effectuant ses études de philosophie à la Sorbonne – il a soutenu une thèse de doctorat sous la direction de Jean-François Lyotard –, il participe au groupe Schizo, qui reflète l'ouverture musicale du début des années 1970. Son inspiration vient du jazz comme du rock psychédélique: The Doors, Miles Davis, Jimi Hendrix, Soft Machine... Gilles Deleuze prête sa voix sur l'un des deux 45-tours du groupe, Ouais, Marchais, mieux qu'en 68. En 1970, le guitariste fait partie des dix heureux musiciens dans le monde possesseurs d'un synthétiseur monophonique, un VCS3. À partir de 1975, avec le groupe Heldon qu'il a formé, il décide de sortir des albums de musique «planante» – Richard Pinhas parle alors de «musiques de guerre», aujourd'hui, on dirait «musique électronique» –, où les machines tiennent un rôle central. Les compositeurs répétitifs américains (La Monte Young, Philip Glass) l'inspirent. En solo, il enregistre le 33-tours Rhizosphère (1976), presque uniquement avec des synthétiseurs, dont un énorme Moog acheté par Cobra, sa maison de disques, à Paul McCartney.

Richard Pinhas, ami et émule de Rober Fripp et de Brian Eno, crée ensuite son propre label, Cuneiform, dont le catalogue «alternatif» est vendu par correspondance. Le groupe Heldon intègre des musiciens et le son se durcit: Un rêve sans conséquence spéciale voit l'arrivée de François Auger à la batterie et de Patrick Gauthier, futur membre de Magma, aux claviers. De 1978 à 1982, cinq albums, dont le plus accessible est East West (1980), vont devenir des références qui annoncent la musique électronique des années 1980 et 1990. Après avoir cessé toute activité musicale pendant sept ans (il se consacre à la philosophie et au parachutisme!), Richard Pinhas revient avec Cyborg Sally (1994), puis avec De l'Un et du Multiple (1996), et travaille avec les romanciers Norman Spinrad et Maurice Georges Dantec pour les trois albums du projet Schizotrope; les deux romanciers travailleront également sur l'album Only Chaos is Real (2000).

Le titre Back to Heldon est construit sur une séquence ascendante d'arpégiateur qui est la superposition de deux triades assises sur un bourdon, c'est-à-dire une note continue; à l'arrière-plan figure une strate plus nébuleuse. La guitare électrique est jouée legato avec un traitement important du son. L'impression de stabilité est donnée par la couleur modale et, en particulier, par l'utilisation du mode de . La symétrie de cette échelle musicale dans la répartition entre les tons et les demi-tons apporte un caractère reposant et presque religieux qui n'avait pas échappé aux Anciens (parmi lesquels Grégoire Ier le Grand). Au sein de cette organisation statique, la guitare joue des dessins mélodiques en procédant par addition autour de deux notes pivots, la fondamentale et la quinte. Dans la même lignée que la musique électronique allemande des années 1970 (celle de Tangerine Dream, entre autres), mais avec l'apport original d'une guitare qui rappelle les «frippertronics» de Robert Fripp, cette musique sait laisser l'esprit en roue libre. Au lieu de s'imposer par des effets appuyés, ces plages incitent à la contemplation sonore des timbres et des constructions entrelacées.

— Eugène LLEDO

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Écrit par

  • : compositeur, auteur, musicologue et designer sonore

Pour citer cet article

Eugène LLEDO. Back to Heldon, HELDON [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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