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BRUYÈRE ANDRÉ (1912-1998)

Mort à Paris le 12 avril 1998, l'architecte André Bruyère a incarné une sensibilité singulière, attachée à l'expression de la sensualité et à la quête d'un certain merveilleux. Né à Orléans le 17 avril 1912, André Bloch, ancien élève de l'école spéciale d'Architecture, a pris le nom de Bruyère dans la clandestinité ; après la Libération il travaille dans la mouvance des organisations liées à la Résistance ou à la déportation. Il conçoit le Rassemblement du souvenir, en forêt de Compiègne, le projet du monument national aux victimes des guerres (1946), le monument français au camp de Mauthausen (1950), et construit à Fleury-Mérogis le centre de postcure de la Fédération nationale des déportés et internés résistants patriotes (F.N.D.I.R.P.), d'une architecture sculpturale très plastique (1948).

André Bruyère pilote le deuxième numéro de Architecture d'aujourd'hui (qui paraît à l'été de 1945, consacré aux Solutions d'urgence) et sera membre du comité de rédaction de cette revue jusqu'en mai 1975, lorsque la vieille garde de l'après-guerre en démissionnera. Parmi les techniques de construction d'urgence, il conçoit la fusée-céramique, une invention qui permet la réalisation économique de voûtes aux courbes paraboliques. Il élabore ensuite pour le même matériau divers projets d'une grande liberté formelle : une chapelle en conque pour São Paulo (1949), un abri souple à deux entrées, dit la Chaussette (1951), un village polychrome étudié avec Fernand Léger (1953) et un projet d'habitations pour les pays chauds (1954). Si aucun de ces projets n'aboutit, ils contribuent néanmoins à forger un langage qui s'épanouira avec la construction, à la Guadeloupe, de l'hôtel Caravelle, abrité sous d'amples mouvements de toiture en voile mince de béton armé (1963).

Son activité de décorateur le conduit à éditer des meubles, à aménager des appartements et des boutiques et plus de quatre-vingts agences bancaires pour le compte de la B.N.P. et de ses filiales. Il construit diverses résidences privées, notamment, à Maussanne, sa propre villa, superbe géométrie de toits sinueux, carrossée de blanc, abstraite et lisse, tapie dans un paysage d'oliviers (1970), et celle d'Enisa Sinaï (1968, puis 1975), la plus ambitieuse, malheureusement inachevée, labyrinthe d'espaces couverts d'un grand voile mince percé de quelques patios. Il bâtit un ensemble de logements à Sausset-les-Pins (1967), avec des loggias profondes et des façades souplement articulées, le centre de thalassothérapie de Quiberon, pour lequel il fait un emploi spectaculaire de coques industrialisées (1967), des laboratoires pour la faculté des sciences à Saint-Cyr (1968), un petit immeuble rue de Bagnolet à Paris (1989). Il mène longtemps un projet de gratte-ciel en forme d'œuf, qu'il propose pour le concours de Beaubourg (1971) et qu'il tente ensuite d'implanter à Manhattan puis à Marseille, au débouché du Vieux-Port (1997).

Dans Pourquoi des architectes ?, André Bruyère définit l'architecture comme « la façon de mouler une tendresse sur une contrainte ». Il applique cette démarche à des programmes relatifs au domaine très « sensible » de la santé, lorsque, dans les années 1980, il est lauréat d'un concours de l'Assistance publique et quand il développe des projets de centres gériatriques, notamment celui de l'Orbe à l'hôpital Charles-Foix d'Ivry (1988). Personnalité originale et poétique, architecte attentif aux problèmes ergonomiques ou phénoménologiques, André Bruyère a défendu une architecture sensualiste dont on ne trouve guère d'équivalent en France.

— François CHASLIN

Bibliographie

A. Bruyère, Pourquoi des architectes ? Jean-Jacques Pauvert, Paris, 1968 ; L'Œuf, The Egg[...]

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François CHASLIN. BRUYÈRE ANDRÉ (1912-1998) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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