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OZ AMOS (1939-2018)

L'écrivain et sa génération

La prose hébraïque des années 1960 connaît d'importants changements non seulement dans le choix thématique, mais aussi dans la conception poétique, romanesque ou purement stylistique. La nouvelle génération d'écrivains nés peu de temps avant la création de l'État d'Israël semble obéir à de nouvelles normes littéraires façonnées autant par une évolution idéologique que par l'influence grandissante de la littérature occidentale. Les premières œuvres d'Amos Oz reflètent clairement cette amorce. Le kibboutz qu'il décrit ne représente plus un idéal infaillible. Les fils, vulnérables et hésitants, contestent l'autorité des pères fondateurs dont le comportement n'est plus exemplaire. Les frontières entre le bien et le mal s'estompent : la menace n'est pas seulement une force extérieure, elle se trouve parfois au cœur même de cet îlot de lumière qui combat l'obscurité.

Les procédés romanesques accentuent cette vision nuancée : l'émergence d'un narrateur peu fiable favorise l'ironie, tandis que les nombreuses pauses qui décrivent le paysage environnant établissent un parallèle entre éléments en apparence dissemblables : hommes et chacals, nomades et sédentaires, amis et ennemis. Le lieu où se déroule l'action acquiert dès lors une valeur symbolique, sans estomper pour autant sa réalité géographique. Qu'il s'agisse des champs du kibboutz ou de Jérusalem, la ville dans laquelle Amos Oz situe plusieurs de ses intrigues (notamment Mon Michaël et La Colline du mauvais conseil), le lieu constitue souvent le reflet ou le prolongement de l'univers intérieur des personnages.

David Grossman, Avraham Yehoshua et Amos Oz - crédits : Alon Ron/ Getty Images News/ AFP

David Grossman, Avraham Yehoshua et Amos Oz

Conformément au tournant opéré par le courant central de la littérature hébraïque, Amos Oz modifie peu à peu sa conception poétique. Les romans publiés depuis les années 1980 sont plus réalistes. Dorénavant, l'auteur accentue davantage l'enchaînement logique des événements, réduisant ainsi la portée symbolique des textes ; les digressions descriptives, moins nombreuses, s'intègrent naturellement dans le récit. L'écriture est plus sobre, le style moins soutenu, même si l'on retrouve toujours chez cet amoureux de l'hébreu (qui n'a pas hésité à réécrire entièrement son premier recueil) la recherche du mot juste et le souci permanent du rythme (Scènes de vie villageoise, 2009 ; Entre amis, 2012).

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Écrit par

  • : maître de conférences en hébreu à l'université Lille-III

Classification

Pour citer cet article

Ziva AVRAN. OZ AMOS (1939-2018) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Amos Oz - crédits : Marilla Sicilia/ Archivio Marilla Sicilia/ Mondadori Portfolio/ Getty Images

Amos Oz

David Grossman, Avraham Yehoshua et Amos Oz - crédits : Alon Ron/ Getty Images News/ AFP

David Grossman, Avraham Yehoshua et Amos Oz

Autres références

  • SEULE LA MER (A. Oz) - Fiche de lecture

    • Écrit par Sylvie COHEN
    • 929 mots

    Amos Oz (1939-2018) est né à Jérusalem de parents émigrés de Russie et de Pologne au début des années 1930. Sa biographie incarne les multiples facettes du mythe israélien : le sabra, l'enfant de Jérusalem, le kibboutznik (en 1954, après le suicide de sa mère, il part s'installer au kibboutz Houlda...

  • ISRAËL

    • Écrit par Marcel BAZIN, Universalis, Claude KLEIN, François LAFON, Lily PERLEMUTER, Ariel SCHWEITZER
    • 26 771 mots
    • 38 médias
    Enfin, c'est aux valeurs sacrées sur lesquelles est fondée la société israélienne qu'Amos Oz (1939-2018), prix Femina étranger 1988 pour La Boîte noire, s'attaque, dès ses premiers ouvrages. Il dévoile l'envers du décor d'une société qui défend des idéaux dont elle se détourne en fait : ...

Voir aussi