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VANNETAIS

De toutes les entités régionales de France, le Vannetais (Bro Gwened, un des quatre « pays » de la Bretagne bretonnante) est l'une des plus stables, au point que, pour l'essentiel, le département du Morbihan se superpose assez bien à la civitas des Vénètes, devenue au haut Moyen Âge le Browaroch, puis, jusqu'en 1789, le diocèse de Vannes. Sur un territoire de quelque 7 000 kilomètres carrés, les plissements hercyniens, de direction armoricaine nord-ouest - sud-est, donnent, du fait de leur structure géologique rubanée, un relief appalachien qui domine dans les landes de Lanvaux, l'ensemble étant très légèrement basculé vers le sud. Au large, les crêtes émergent en chapelets d'îles et de presqu'îles (Groix, Quiberon, Houat, Hoëdic, Belle-Île), tandis que la mer a envahi les parties basses, comme la cuvette d'ennoyage du golfe du Morbihan. Les rivières, suivant la pente générale du mouvement de bascule, recoupent les rubans de roche dure en pittoresques défilés.

Autour du golfe du Morbihan et de Carnac s'est développée, à partir de ~ 6000/~ 5000, la puissante civilisation des mégalithes qui atteint son mystérieux apogée dans les alignements de Carnac. Au ~ ier siècle, la thalassocratie des Vénètes, fondée sur une originale marine à voile, assure le transport des métaux des îles Britanniques (étain) vers la Méditerranée. C'est une grande puissance, qu'illustrent ses frappes de monnaie. En ~ 56, la grande bataille du golfe marque la destruction de cette puissance et la fait disparaître dans l'anonymat de la romanisation. D'après certains linguistes, le breton du Vannetais ne proviendrait pas de l'invasion bretonne du ve siècle, mais de la survie sur place, tout l'Empire romain durant, du gaulois local. Au Moyen Âge, l'abbaye de Saint-Gildas-de-Rhuys devient le refuge (détesté) d'Abélard. Les ducs de Bretagne attachent beaucoup d'importance à la partie sud de la région, comme en témoigne le château de Suscinio, prototype militaire largement imité jusque dans le Périgord. Du xve au xviie siècle, le golfe est l'un des grands foyers de la marine bretonne. Richelieu, aidé du maréchal de La Meilleraye, fonde de grands espoirs sur la compagnie des Cent Associés. Ces espoirs sont déçus au xviiie siècle, qui ne voit que le développement spectaculaire de la ville champignon de Lorient, fief de la Compagnie des Indes orientales, mais largement étrangère au pays. Sous la Révolution, le Morbihan est le cœur de la Bretagne contre-révolutionnaire : ses campagnes, marquées par le drame de Quiberon (1795), sont, par moments, totalement chouannes, et cela jusqu'au début du Consulat. Puis tout s'endort. Vers 1835, d'Angeville décrit le Morbihan comme le département de France ayant la meilleure moralité (peu de bâtards, peu d'enfants trouvés, peu de crimes, levée facile des impôts, cependant nombre important d'insoumis), mais aussi comme l'un des plus pauvres (durée de vie courte, hygiène médiocre, alphabétisation très en retard).

Cette région archaïsante et traditionnelle se réveille lentement au xxe siècle. On y crée, après la Première Guerre mondiale, le port de pêche de Lorient ; le tourisme côtier s'y développe. De plus, l'essor de Vannes contribue à modifier l'image de marque d'une région qui offre, avec son climat doux et ensoleillé, le charme de ses grandes plages de sable, les contrastes de ses reliefs en creux — d'altitude absolue pourtant faible —, la nostalgie de ses landes que mai transforme en coulées d'or, une gamme de paysages très diversifiée. Au total, le Vannetais a gardé de son histoire une part de son mystère, tandis que l'évolution contemporaine se caractérise par une bicéphalie entre Lorient (communauté d'agglomérations de 180 000 hab. en 2005), avec son port de pêche et son port[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Rennes

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Pour citer cet article

Jean MEYER. VANNETAIS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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